Anopheli
Crust/Punk mélancolique

The Ache Of Want
01. Awoken
02. Acts Of Man
03. Squanderer
04. Ruminations
05. Somnambulant
06. Trade
Chronique
Les Finlandais d'Apocalyptica n'ont pas le monopole du violoncelle chez les formations à caractère Rock Dur. Avec un membre de Fall Of Efrafa dans leurs rangs, Anopheli ouvre une nouvelle voie en accouplant les cordes frottées aux cordes pincées, grattées et égratignées d'un hybride Crust/Emo. Le D-Beat pour la lourdeur, l'archet virevoltant pour la légèreté, et voilà que naît The Ache Of Want, premier brûlot en version longue des Californiens.
Comme quoi on peut encore surprendre en 2015 : rapprocher deux univers musicaux qui a priori n'ont rien en commun et en faire un mélange talentueux. Les premiers instants d'« Awoken » illustrent ce contraste, un coup de tonnerre lâché après une amorce douce et progressive, un chant à fleur de peau, arraché à l'âme et aux tripes. Et les cordes de larmoyer, de coucher sur la portée la tension du verbe (« Acts Of Man »); c'est une aura lyrique et plaintive qui s'en dégage, formant avec la voix un duo virulent et désespéré.
Et si violence il y a, celle-ci prend une forme plus humaine et tragique encore lorsque s'enlacent les cris et le calme des guitares claires, secondées par les notes mélancoliques du violoncelle sur « Somnambulant ». Dans la même veine« Ruminations », bien qu'uniquement instrumental et acoustique, est chargé d'émotions du fait de ses prédécesseurs, un moment de répit qui par sa beauté simple et sincère réussit à toucher et tout chambouler. Anopheli se partage entre l'urgence des rythmes et des sons, et une désillusion lancinante une fois la tempête loin derrière.
Ressortir insensible de ces quarante minutes semble assez impensable, tant le groupe se livre et se met à nu avec une efficacité déconcertante. Pas d'avant-gardisme poudre aux yeux qui mettrait en l'air les styles pratiqués mais une habile maîtrise de ceux-ci suffit à rendre attrayante une telle sortie. La longueur des pistes a tout de même de quoi étonner, avec une moyenne d'environ sept minutes, propices à établir un climat singulier sans l'écueil trop rentre-dedans du Crust. « Trade » offre ainsi un final orchestré en mouvements de plus en plus traînants, pour aboutir à un chant du cygne étiré concluant avec succès un album plaintif et viscéral.
A Hunger Rarely Sated paru un an plus tôt promettait une belle ascencion, concrétisée aujourd'hui par The Ache Of Want. Production plus opaque, filiation au Hardcore moins apparente pour plus de noirceur et de spleen, Anopheli poursuit sagement sa route dans la pénombre, les tourments et ne nous invite qu'à plonger avec eux.
L'album est en écoute et en téléchargement libre sur bandcamp.
Du crust fait avec classe.