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Biographie

Anomie

Faisant partie de la scène française emo du milieu des années 90, le "french way of emo" comme on l'appelle à l'étranger, Anomie présente la particularité d'être l'un de ces rares groupes d'emocore à chant féminin. Originaire d'Orleans et formé d'anciens membres d'Escape  notamment, le groupe enregistre un premier split / EP avec l'un des groupes précurseurs de l'emo en France, Peut-être. Ce premier brûlot (si l'on excepte la cassette démo sortie par le biais du label Ape) est distribué par Stonehenge Records, LA référence de l'époque en matière d'emocore en France (Undone, Fingerprint, Jasemine, etc.). Suivront un LP partagé avec les allemands de Peace Of Mind ainsi qu'un album. En 2000, Spurt a la bonne idée de regrouper les morceaux d'Anomie dans cette Discographie qui comprend la majorité des morceaux du groupe (si ce n'est ceux présents sur le split avec Peut-être  qui sont le moins appréciés par le groupe), ainsi que quelques compositions trouvables uniquement sur certaines compilations (Food not Bomb V/A et 51 Comp. pour ne pas les nommer). Anomie restera comme l'un des groupes d'emocore français les plus influents et les plus important sur la scène internationale.

Chronique

17 / 20
7 commentaires (16.43/20).

Discographie ( 2000 )

Selon Durkheim, l'anomie prend forme chez l'individu lorsqu'il existe un écart important entre ses idéaux et les valeurs sociétales. Un simple coup d'oeil sur les titres des morceaux de notre quatuor  suffit  à se rendre compte du pourquoi du nom du groupe: "Avorter n'est pas tuer", "Remise en cause", "Chercher des solutions", ...  Les paroles ici sont sombres, engagées, revendicatives pour ne pas dire politisées. Et pourtant on parle bien ici d'emo. Fortement ancré dans une tradition punk certes, guidé par une démarche totalement DIY aussi, violemment hardcore sans conteste, mais emo avant tout. Il suffit d'entendre une fois la voix de Kathleen pour s'en rendre compte: dès les premières gueulantes, le désespoir est palpable, les spoken-words désespérés et pleins d'émotion mettront tout le monde d'accord. Et l'on s'apercoit vite que ce chant féminin gagne en émotivité ce qu'il ne perd pas en hargne, car les hurlements de la chanteuse, quelque fois secondée par ses acolytes, valent décidemment le détour. En route donc pour cette discographie qui suit un ordre "anti-chronologique" et débute donc par les derniers morceaux en date d'Anomie.

 Premier acte, celui de l'exposition et ouverture du rideau sur l'ultime LP du groupe datant de 1997 et distribué jusque-là au Canada uniquement. Dire que de tels morceaux n'étaient pas disponibles en France alors même que le groupe était l'un des fleurons du hardcore hexagonal...  Ultimes méfaits du groupe donc, les plus travaillés sans doute, les plus alambiqués aussi. Mais Anomie  n'en a pas pour autant oublié les élans primitifs du punk: rapidité et énergie sont de mise, même si le groupe s'autorise une intro accoustique sur "Acceptation" (très réussie et totalement dans le ton d'ailleurs) et un sample qui clôture "Manipulation". Le dernier morceau de ce LP rend hommage à Ulrike Meinhoff, journaliste allemande qui eut un impact idéologique prépondérant sur la R.A.F. (Rote Armee Fraktion, ou Fraction armée rouge). Le message est clair et radical: la guerilla urbaine est un moyen de résister à l'oppression, ne rien faire, c'est soutenir le système actuel. Au final, que l'on soit d'accord ou non avec les propos radicaux du groupe, toujours est-il que ceux-ci vont bien plus loin et sont bien plus intéressants que le sempiternel et vide de sens "Vive la révolution" balançé si souvent par de nombreux groupes à un public conquis d'avance par tant de pseudo-subversion.
Les morceaux issus de splits de diverses compilations ne sont pas en reste, le deuxième acte débute sur les chapeaux de roue avec deux morceaux très emo, deux des meilleurs morceaux d'Anomie assurément ("Alienation", "Remise en cause, revolution, dilemne"). Mais la musique de notre quatuor ne nous laisse décidemment aucun répit, même lorsque quelques mélancoliques mélodies s'échappent de la guitare pour s'engouffrer dans la brêche laissée vacante par le hardcore abrasif des morceaux. Point d'errances ici, le ton est direct, le contenu sans concession.
Troisième et dernier acte avec au programme les premiers pas de nos acteurs avec cette demo datant de 1994. Première constatation, Anomie n'aura pas attendu avant d'affirmer son style. Tous les ingrédients que l'on retrouvera dans les efforts à venir sont déjà présent. Mieux, l'explosivité est ici à son comble, la tension atteint son paroxysme, la machine est donc lancée, et de quelle manière! Finalement, on se dit que ce son spartiate et certes moins précis que sur leurs futurs opus sert le caractère radical et  subversif de cette musique, pourtant jamais dénuée de grâce.

 Fin de la pièce, retour chez soi, la larme à l'oeil, mais le cocktail molotov à proximité. Car même désespéré, le groupe n'en oublie jamais la révolte. Et même agitateur de conscience, Anomie reste toujours un formidable catalyseur d'émotions.  Rarement la puissance et la violence du hardcore n'auront été couplée avec une telle émotivité. Rien à jeter au final, pas un unique morceau, de la première demo aux samples finaux clôturant le LP, une discographie parfaite et une rebellion jamais démentie.
Et le dénouement me direz-vous? Il n'est malheureusement pas à la hauteur du spectacle qui nous aura été offert, car si nombre de groupes de screamo savent bien ce qu'ils doivent à Anomie, une partie du public a par contre déserté la salle, privant Anomie d'une standing-ovation pourtant bien méritée. Et finalement, les représentants du "french way of emo" sont souvent plus connu hors de nos frontières (jetez un oeil sur la localisation de la page myspace du groupe pour vous en convaincre).

A écouter : Tout