Encore un duo Heavy mélodique / Hard Rock FM de chez Frontiers Records. Encore le même producteur qui initie le "groupe". Encore le même compositeur-gratteux-bassiste-claviériste qui pilote l'instrumentation. Encore une pochette kitsch qui marque l'opposition des deux protagonistes principaux. Après tout ces "encores", y a-t-il vraiment un intérêt à tenter l'écoute de ce Worlds Apart ?
Russell Allen (Symphony X, Adrenaline Mob, entre autre) et Anette Olzon (ex Nightwish le temps de deux albums). A première vue, deux pointures. Deux tessitures différentes, des approches complémentaires. Pourquoi pas. Vocalement, en effet, le duo se complète bien et évite de faire doublon à la formation Kiske / Somerville grâce à des timbres bien reconnaissables. En revanche, l'originalité s'arrête là. Les compositions pourraient être interchangeables et chantées aussi bien par Russel Allen et Anette Olzon que par Mickael Kiske et Amanda Somerville. On reste dans un très gentil et conventionnel Power Heavy mélodique teinté d'AOR, globalement pas assez vénère / rapide / technique pour être vraiment intéressant à écouter, mais néanmoins un peu trop pêchu pour n'être qualifié "que" de mid-tempo radiocalibré. L'ensemble n'est pensé pour mettre en avant que les deux vocalistes, musicalement ça ne casse pas des briques. Il y a bien quelques leads de guitare conventionnels, mais bon. C'est somme toute assez dommage d'en arriver à des démarches si réductrices pour réussir à mettre en lumière les chanteur.euse.s, alors que Russell Allen sait se placer habilement dans des titres aux structures complexes et qu'Anette Olzon a l'habitude des arrangements symphoniques grandiloquents. Si vous vous attendiez à un crossover de Nightwish et de Symphony X, du Prog néo-classique technique et vitaminé avec une surcouche orchestrale puissante et majestueuse, vous serez vraiment très déçu.e du voyage.
Mais même s'ils sont simples, la plupart des titres fonctionnent suffisamment. Fans de power-ballades (What If I Live, One More Chance, Who You Really Are) ou de refrains kitschs et pêchus (I'll Never Leave You, Lost Soul, Never Die), il y a peut-être quelque chose pour vous dans Worlds Apart. Et puis ne nous voilons pas la face, certains passages valent le coup : l'intro de Lost Soul, très vieux-Nightwish justement ; l'efficacité de I'll Never Leave You ; l'excellent solo de guitare dans No Sign Of Life... Détail étrange : dans Allen / Olzon, parfois, on n'entend seulement la partie Olzon, d'autres fois que la partie Allen. L'intérêt de les faire collaborer, c'est de proposer des duos plutôt que des duels, à mon sens, c'est à dire les faire chanter sur les mêmes titres plutôt que répartir les morceaux en mode "chacun les siens". A la première écoute, on se demande même s'il n'y a pas erreur, car le titre d'ouverture ne met en scène que Russell Allen, et la seconde piste, bien qu'étant un duo, commence par un couplet de l'Américain... Le doute s'installe avant que la Suédoise n'intervienne enfin. Au final, sur les onze morceaux, seuls cinq sont chantés à deux (la frontwoman en chante trois seule, même tarif pour le frontman). M'enfin, cette pratique se fait déjà comme ça sur les autres productions du même acabit qu'on évoquait plus haut. Un vœu pieux, donc.
Cette collaboration n'apporte donc rien de neuf comparée aux autres du même genre et produites par les mêmes gens. Si les protagonistes font ce qu'on leur demande, le rendu global est loin en dessous de ce qu'on peut attendre d'eux dans leurs autres formations. Compte-tenu du line-up derrière le micro, du style musical pratiqué, et de la lassitude provoqué par l'ensemble, on aurait préféré qu'il s'agisse d'un seul titre sur un album d'Avantasia, sans forcément s'obliger à décliner la formule sur onze pistes.
A écouter : I'll Never Leave You