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Biographie

Ahab

Ahab est un groupe formé en 2004 à Esslingen (Allemagne) par Stephan Adolph (basse, guitare, chant), Daniel Droste (chant, guitare, claviers) et Chris R. Hector (guitare, Midnattsol, Penetralia). Il ne pourrait être qu'une autre formation de Funeral Doom, cependant le groupe tire son épingle du jeu grâce à un concept très personnel. En effet, le nom du groupe est en référence au capitaine dément qui poursuit Moby Dick dans le roman de Melville, et toutes les paroles et artworks renvoient à cette lutte titanesque.
Il ne faut qu’un an au groupe pour sortir une première démo, The Oath, qui bien que tirées à seulement trente exemplaires, reçoit un accueil enthousiaste au sein de la scène Doom. Ce disque montre la formation officiant dans un Funeral Doom incroyablement lourd et massif et néanmoins bardé d’ambiances, proche de Tyranny.
Le groupe retourne en studio après quelques concerts, notamment au Doom Shall Rise IV, et son premier album, The Call Of The Wretched Sea, sort le 29 septembre 2006 et remporte un franc succès dans l'underground. Après une réédition de sa démo chez Nothingness Records, le groupe tourne intensément, avant de finalement retrouver le studio pour enregistrement un second opus. The Divinity of Oceans voit le jour en 2009. C'est en 2012 qu'Ahab, désormais bien installé dans le paysage Doom, sort son troisième album, The Giant, chez Napalm Records.

17 / 20
3 commentaires (16.17/20).
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The Boats Of The Glen Carrig ( 2015 )

2015 marque le retour des allemands de Ahab au premier plan. Leur nouvel opus de "nautik funeral doom", The Boats of Glen Carrig, fait directement référence à la nouvelle du même nom de l'auteur William Hope Hodgson parue au début du vingtième siècle. Encore une fois chez Ahab la mer est omniprésente, cette fois sous une forme horrifique. Embarqués sur des canots, les rescapés du Glen Carrig tentent de rejoindre la civilisation. En chemin, ils rencontrent les abominations d'un monde mi-animal, mi-végétal où la terreur est permanente. La musique de Ahab sert ainsi d'écrin à ce récit méconnu. 

The Isle, la première piste, est une introduction entre calme et tempête où le chant guttural se pose sur une orchestration pachydermique, véritable marque de fabrique des allemands, sans pour autant négliger la mélodie avec un joli pont sur le chemin. Le son est toutefois principalement toujours aussi écrasant, l'atmosphère lourde et menaçante. Ahab parvient aussi à injecter de la douceur dans sa musique. C'est particulièrement vrai en ce qui concerne les introductions des morceaux, The Isle donc, mais aussi et surtout The Thing That Made Search. Le chant clair y apparaît pour donner un peu plus d'humanité et de fragilité à univers qui n'est pas que terrifiant. Dans ce même morceau le passage au funeral doom proprement dit est abrupt, maintenant ainsi l'auditeur sous l'éteignoir. On distingue néanmoins quelques passages de guitares qui enrichissent les compositions en leur donnant un peu de souffle. 

Ahab reste principalement dans sa zone de confort, mais le fait très bien, tout en offrant quand même de la variété dans ses compositions. Le groupe maintient ainsi une atmosphère pesante où le danger n'est jamais loin, à l'image de l'odyssée de ses marins pris dans la tempête, ce que souligne le morceau Like Red Foam (The Great Storm). Les guitares ont comme toujours chez Ahab la part belle. Elles donnent vie à des sentiments profonds d'abandon, mais aussi d'espoir lorsqu'elles se font plus légères. La plupart du temps elles évoquent ainsi les flux et reflux d'une mer agitée. Le morceau The Weedmen est particulièrement habité. Outre le chant guttural et clair en alternance, les guitares y oscillent entre langueur puissante tout du long et éclaircies mélodiques. Le désespoir semble véritablement jaillir des abysses avec cette longue piste en forme d'éprouvante traversée. 

To Mourn Job démarre tout en douceur avec des motifs de guitare tout en finesse et un chant clair magnifique. Puis, une jolie montée nous ramène en terrain familier, avec ce growl monolithique et ces guitares dévastatrices, mais aussi mélodiques par fragments. Un pont nous laisse même respirer un moment avant une nouvelle épreuve de force. On est ainsi encore une fois submergé par la puissance de la musique de Ahab, toujours aussi évocatrice, au diapason de cette histoire de marins abandonnés au prise avec la mer et ces dangers. The Light In The Weed (Mary Madison) est la conclusion parfaite à cet opus. Le morceau se pose une nouvelle fois en douceur avec une très jolie mélodie et de discrets arrangements de guitares. Aux deux tiers, le chant clair fait contrepoids à une débauche de guitare, tout en force, puis le calme revient. C'est la fin du voyage. 

Avec The Boats Of The Glen Carrig, Ahab nous offre un fort bel album. Le fond et la forme s'y nourrissent l'un de l'autre pour un résultat enthousiasmant. Un grand disque de funeral doom. 

A écouter : comme une traversée en mer agitée
17 / 20
2 commentaires (15.75/20).
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The Giant ( 2012 )

  Troisième album pour les Allemands d’Ahab qui continuent de pousser toujours plus avant leur concept de ‘nautik funeral doom’ au rythme d’une sortie tous les trois ans. Ayant crevé l’écran en 2006 avec leur premier opus The Call of the Wretched Sea basé (attention révélation !) sur Moby Dick de Herman Melville (1851), ils avaient refait surface en 2009 avec The Divinity of Oceans, inspiré du récit du naufrage du baleinier Essex d’Owen Chase (1821), pour un résultat moins convaincant. Ce coup-ci, ils s’attaquent avec The Giant à un autre gros morceau de la littérature de voyage, à savoir Les Aventures d’Arthur Gordon Pym (1838), seul roman achevé d’un certain Edgar Allan Poe.

  Si, avec le choix d’une telle œuvre, le groupe semble témoigner de sa fascination pour la terra incognita, musicalement, on reste en sentier balisé : il s’agit toujours d’un funeral doom pachydermique soutenu par des guitares tantôt lancinantes, tantôt écrasantes (Fathoms Deep Below, The Giant), véritable marque de fabrique d’une formation désormais bien installée parmi les grands pontes du genre. On aurait pu s’inquiéter d’une orientation plus stoner en découvrant cet artwork d’un goût  plutôt douteux, mais il n’en est rien. Si le rythme est peut-être légèrement plus enlevé qu’auparavant, le disque est globalement aussi lent qu’une traversée sans vent, même ses des bourrasques apparaissent parfois subitement (The Giant).

  On note pourtant des innovations, et notamment concernant le chant ; si The Call of the Wretched Sea n’était que growl monolithique tandis que The Divinity of Oceans faisait la part belle au chant clair, Ahab a cette fois opté pour plus de variété. Ainsi, non seulement growl et chant clair alternent-ils régulièrement (Aeons Elapse), un certain nombre de variations apparaissent, telles les murmures en ouverture de Fathoms Deep Below ou l’apparition de chœurs qui ponctuent ce magnifique morceau qu’est Antarctica (The Polymorphess), ou le final grandiose incarné par The Giant*. Cette plus grande variété vocale est à saluer, car les compositions en semblent plus aérées et se différencient d’autant mieux les unes des autres. En cela, ce disque est peut-être légèrement plus accessible que ses grands prédécesseurs.

  Mais attention, si l’ensemble est peut-être moins écrasant qu’auparavant, il n’en a rien perdu en ambiance ; Ahab prouve encore une fois son talent pour maintenir une véritable atmosphère tout au long de ses albums, en l’occurrence celle d’une étrange et inquiétante traversée, semée d’embûches, où la folie n’est jamais très loin… soit exactement le sujet du récit sur lequel est basé l’album. Daniel Droste est d’ailleurs parfait dans son rôle de narrateur : son magnifique chant clair, empli de crainte et de désespoir, jamais loin de la rupture, et en cela très émouvant, évoque aisément Pym condamné à voyager toujours plus loin, sans savoir vers quelle destination (Further South).

  Cependant, le véritable tour de force de ce disque se trouve dans l’utilisation des guitares ; hypnotiques à souhait, elles tissent ce sentiment d’angoisse diffus qui pourrait être celui d’un équipage embarqué vers une destination inconnue (le break de Fathoms Deep Below, Deliverance (Shouting at the Dead)). Elles savent également se faire ravageuses comme sur Antarctica par exemple, ou sublimes de clarté quand, quasi systématiquement en fin de morceau, elles finissent par supplanter le chant en des montées en puissance terribles qui évoquent peut-être davantage que de simples paroles.

  Ainsi, avec un The Giant plein de maitrise, Ahab continue son exploration de la littérature de voyage, en descendant toujours plus au sud. A ce rythme là, il ne serait pas étonnant de voir le groupe travailler sur Le sphinx des glaces (1897) de Jules Verne, ou, osons l'espérer, sur Les montagnes hallucinées (1931) de Howard Lovecraft... Quoi qu'il en soit, Ahab en profite pour rappeller à tous qu’il est ce groupe intelligent, ambitieux et innovant, et que son précédent effort n’était peut-être qu’une simple erreur de compas. A coup sûr une des sorties de l’année dans le genre. Et dire qu’un nouvel Evoken a débarqué cet été…

 * La version LP de l’album comporte deux titres bonus, Times like Molten Lead et Evening Star, qui n’apportent pas grand-chose et dénotent même quelque peu car ils semblent tout droits sortis du premier album.

The Giant est en écoute ici.

A écouter : Ahoy !
18 / 20
6 commentaires (17.75/20).
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The Call Of The Wretched Sea ( 2006 )

  Après une première démo remarquée malgré un tirage très faible, AHAB était attendu de pied ferme par les quelques heureux possesseurs de The Oath. Bien que ne figurant pas parmi les formations les plus connues au sein de la scène Funeral Doom, les Allemands se démarquaient des autres formations du genre de par leur concept autour de Moby Dick.
 
Avec ce premier album, on devine aisément à l’artwork que l’univers n’a pas changé, puisque la couverture est exactement la même que celle de la démo: Moby Dick émergeant de flots tumultueux, créant panique et désolation au sein des marins venus sur des canaux défier le mastodonte blanc. Ceci rappelle au passage l’artwork du Leviathan de Mastodon, très similaire.
Les premières minutes confirment également que le groupe continue sur la lancée entamée avec The Oath. Le son est en effet écrasant de lourdeur, les guitares évoquent un mur sur lequel viennent se fracasser des vagues de claviers, la voix growl est plus monolithique que jamais, et le tout est soutenu par une section rythmique impeccable. Tout ceci contribue à créer une véritable ambiance, menaçante et néanmoins terriblement envoûtante, proche des Finlandais de Tyranny. L’ensemble pourrait incarner le Pequod, gigantesque navire chasseur de baleines avec le capitaine Ahab en proue, dément et bouillonnant de rage envers Moby Dick. Ce disque d’une grosse heure est ainsi sans surprise un concept album autour de l’univers du roman de Melville, comme l’était déjà son prédécesseur.
Pour renforcer cette idée, Le groupe est allé jusqu’à indiquer sur la tranche du disque son propre style musical, le « Nautik Funeral Doom », et cette fantaisie n’est pas vaine, tant sa musique est liée à l’univers marin. Le titre, The Call of the Wretched Sea, symbolise cet appel lancé par le groupe à embarquer avec lui sur le Pequod.
Cet album est un voyage, non seulement en compagnie du capitaine mais également une sorte d’introspection. En effet, les paroles évoquent ses pensées, avec ses doutes, ses peurs, mais aussi et surtout sa rage et sa détermination à vaincre le monstre immaculé qui le laissa jadis unijambiste. L’ambiance est très sombre comme dans le roman, et permet facilement à l’auditeur de s’imaginer sur le vaisseau au milieu des flots déchaînés, avec le capitaine le fixant d’un œil sombre et maléfique. Les textes cadres eux aussi parfaitement avec ceux du livre, et certains, comme The Sermon, semblent en être même directement tirés. Ils retranscrivent à merveille la chasse démente du capitaine jusqu’au bout de la folie, qui le mènera à sa perte lors d’une ultime confrontation avec le monstre marin. Cet album est ainsi une bande son parfaite pour quiconque souhaitant s’immerger totalement dans la lecture du roman.

  The Call of the Wretched Sea est donc une véritable réussite. AHAB réussit une nouvelle fois à se démarquer des autres formations de Funeral Doom grâce à une recette simple mais terriblement efficace. Ce premier effort montre une réelle capacité à composer et à créer des ambiances prenantes, chose tout de même assez rare pour un groupe si jeune.
En conclusion, AHAB peut être légitimement considéré comme un futur grand du Funeral Doom, s’il parvient à se renouveler. Cet album est assurément une des grosses sorties Doom de l’année et permet de croire aux chances des Allemands de figurer aux côtés des plus grands dans les années à venir.

Le roman d'Herman melville, Moby Dick, est en téléchargement intégral (en Anglais) ici.

A écouter : En entier pour se d�couvrir une �me de marin