Quatre ans. Tel était, au matin de la release party de son premier album, le délai écoulé depuis la dernière apparition d'Abysse au programme des sorties. Quatre ans à retenir son souffle c'est long d'autant plus que le quatuor a, vu de l'extérieur, peu ou prou passé la moitié du temps écoulé en quasi-hibernation. Pourtant, à chacune de ses (rares) sorties Abysse aura exposé une franche envie d'en découdre, affichant des prétentions et un niveau de virulence en hausse régulière qui laissaient augurer du meilleur pour un Long Play que l'on n'attendait presque plus. Bouclé fin 2011, En(d)Grave débarque enfin au printemps 2012.
En(d)Grave, bien qu'issu de l'imagination d'un groupe qui s'est un peu trop fait oublier, reste le premier album d'une formation déjà débrouillarde qui s'est en prime laissé le temps de développer un son déjà prometteur. Les premiers frémissements sont d'ailleurs explicites au possible quand à la teneur des trois quarts d'heure à venir: en dépit de son mutisme forcené et de sa discrétion Abysse a continué sa mutation. Remuant, racé et définitivement ferme sur ses bases, c'est un nouveau visage que dévoile le quatuor dès Eagle Of The Haast / Ten Thousand Changes. Ses contours, reconnaissables mais toujours aussi difficilement identifiables se sont affirmés, affermis voire franchement durcis. Toujours sans extravagance particulière, les choletais avoinent avec une force que l'on ne leur connaissait jusqu'à présent qu'en live un Metal plus fort en progressions longue durée, plus complexe et, surtout, beaucoup plus puissant et explosif que par le passé. Impose la force de son propos plus qu'il ne la dévoile timidement.
Et surtout Abysse continue de sonner comme Abysse. Mais en mieux. La mal nommée Mastodon et sa lointaine voisine Light For Wheke auront beau soulever quelques inquiétudes avec leurs faux airs Gojiriens les choletais bifurquent comme à leur habitude bien vite et avec leur éternelle fluidité vers un plan du cru, qui, invariablement, semble ne précéder que de peu la mutation suivante du gros monolithe que semble en réalité être En(d)Grave. A force d'écoutes répétées, là même l'on devrait s'amuser à discerner chaque fois plus les subtilités des sept compositions faisant En(d)Grave, c'est au contraire un sentiment d'unité qui frappe. Un magma d'idées et de riffs en fusion crevé de petites bulles de génie, continuellement remodelé avec une volonté inébranlable d'aller de l'avant, de proposer une musique plus primairement efficace mais aussi intelligible qu'intelligente refusant d'aller se vautrer sur un confortable matelas de lieux communs. Tout morceau en appelle un autre, chaque écoute une suivante et l'ensemble met régulièrement en échec toute tentative d'assimilation avec l'album du voisin.
Plus direct et toujours aussi étrangement flou, l'ex "môme" Abysse réussit le petit tour de force de se continuer de se démarquer sans, semble-t-il, toujours rien inventer d'absolument révolutionnaire, noyant des influences faussement lointaines (Tool et Hypno5e, notamment) dans sa petite mer d'idées fraîches. En(d)Grave se révèle être un disque costaud, expressif et vivant d'ores et déjà classable un bon cran au dessus des premiers ébats du groupe en terme de composition et d'énergie. Au final on regrettera seulement un peu le timing qui place aujourd'hui d'avantage ce premier album dans le haut du panier de toute une frange de la scène française globalement en forte progression/confirmation (Hypno5e, Uneven Structure, Om Mani, Hacride, Step In Fluid, Eryn Non Dae....), que dans le wagon des très grosses sorties de ces dernières années. Cette considération mise à part on retiendra surtout qu'Abysse vient probablement, avec ce petit disque ultra solide, de s'ouvrir quelques portes qui lui permettront, espérons le, de revenir à nouveau plus vite et encore plus fort.
Le concept est intéressant, vive les groupes instrumentaux !
Par contre, quelle déception au niveau de la créativité, de l'originalité, de l'efficacité et de la personnalité ! (une vraie histoire de 'té' !)
Bref, j'aime pas du tout ce mélange de style trop proche dans le jeu, metal, stoner, doom, heavy, postcore... tout ça collé ensemble.. bof bof :/
Je rentre complètement dans le délire d'un Impure Wilhelmina, mais hélas avec Abysse ça ne prend pas, j'en retiens rien..