Avec une des discographies les plus prolixes de ces
dernières années, ce bougre de Damian Master a quand même sorti depuis la
création du projet en 2011, dix neuf eps, trois compilations et donc avec Broken Play, deux albums. Mais nous, on ne nous la fait pas ! On connait la
chanson ! La quantité se fait au détriment de la qualité, alors allons
sniper cet album méthode chroniqueur chez Ruquier !
Vous noterez bien que dans le décompte des albums, il n’a
été cité que ceux estampillés sous le nom A Pregnant Light, si l’on comptait
ses autres projets solo, Purple Light, Alluring, Secret Creation et bien
d’autres encore, il faudrait rajouter quatorze autres eps et deux autres albums.
Monsieur Master, c’est trop ! Il suffit d’ailleurs de simplement entendre
un début de morceau pour que la vacuité et la pauvreté de ce que vous appelez
musique, saute aux… Damned.
En fait, peu importe la quantité d’albums
sortis avant, Broken Play prend aux tripes direct. Aux confluents de… tous
les genres et sous-genres de Metal, c’est une musique à la fois bigarrée et
homogène qui s’impose à l’esprit avant que le cerveau n’ait réellement eu le
temps de l’analyser. Inutile de perdre du temps à essayer de définir un genre,
il n’y en a pas. Tel riff peu faire penser à Kvelertak, un autre à Burnt By The
Sun, celui-ci à Metallica, parce que pourquoi pas, celui-là à Iggy Pop et
l’autre d’après à Faith No More et puis c’est tout. Et c’est donc dans ce Post Rock / Metal
cisgenre qu’on est embarqués pour une traversée qui parait trop courte tant
elle est intense et riche en émotions.
Les alternances successives de ces styles entraînent une
attention permanente et permettent une déclinaison non linéaire de beaucoup
d’états différents ressentis par l’auteur. C’est comme si, pour faire paraître
le sentiment qu’il souhaite exprimer, il mettait au diapason la structure du
morceau, la ligne de composition, les mélodies et rajoutait par-dessus un style
qui vient teinter et renforcer ce qu’il veut mettre en avant. C’est comme ça
qu’on se retrouve avec des morceaux très fougueux comme Broken Play et d’autres
très intimistes et profonds comme Holy Death Candle ou d’autres qui amènent
plus à une réflexion comme L.I.G.H.T.
Damian Master se pose sur cet album en Trent Reznor post
moderne en catalysant pas mal d’influences, et par son talent et sa mesure du
dosage hors pair à retranscrire le meilleur de celles-ci via les huit morceaux de Broken Play. Poussant le narcissisme d’auteur complexe, torturé et génial
jusqu'à mettre en guise de jaquette de ses albums son image en photo noir et
blanc, plan serré, à la manière qu’aurait pu avoir Ingmar Bergman pour faire
ressortir la détresse d’un personnage dans l’un de ses films. Tant de miroirs,
ce sont les sottises d’autrui, miroirs, de nos défauts les peintres légitiment.
Cet album est changeant, parfois violent, parfois plus
tendre, pas mal d’inattendu, d’émotions, d’onirisme, il ne se soucie pas de ce
qui se passe chez le voisin, il ne rentre dans aucune case mais n’est pas
étranger de tout pour autant. En fait, cet album est à l’image de la vie, il
existe.
A écouter : Broken Play, Holy Death Candle