L'amusant avec ce nouveau
16, c'est que le groupe se retrouve dans la même situation que Black
Cobra avec Feather And Stone et Taint (R.I.P) avec Secrets And Lies. A savoir
qu'après un retentissant premier effort qui avait fortement marqué
à la fois le public et la critique dans le sens le plus positif
possible, c'est qu'ils ont obligation de faire mieux que le presque parfait, un second effort qui regroupe tout ce qu'on attend d'un groupe de sludge
qui cogne: à savoir des riffs gras-issimes, de la violence hardcore,
des atmosphères glauques, une intensité sincère et prenante dans
le chant et les compositions et l'indispensable étincelle qui fera THE disque.. Seulement, pour 16, ce n'est pas leur
deuxième album mais bien leur huitième ! Si la comparaison avec les deux jeunes gangs suscités peut surprendre, c'est que les
américains ont été véritablement révélés à la face du public
metal actuel par Bridges To Burn, arrivé en pleine gloire médiatique de
toute cette scène à la fois heavy et hardcore apparanté au sludge
qui a émergé vers 2007 et sur laquelle nous nous sommes voracement
jeté dessus alors que nous venions à peine de finir notre «
initiation » à l'extrême.
Ne niez pas que, vous
comme moi, on se faisait probablement encore torcher le cul par nos mères quand ils
ont démarré leur carrière et que ce n'est qu'après un intérêt
excité par la propagande insistante de Relapse et un artwork de
toute bÔté qu'on a prit une mandale qui nous durablement incrusté
les molaires dans la pomette.
Autant vous dire donc que
ce Deep Cuts From Dark Clouds va franchement souffrir de la
comparaison avec son prédécesseur.
Commençons par les
mauvaises nouvelles. Globalement, Deep Cuts From Dark Clouds est un
peu plus mou, manque de « hit » comme pouvait l'être
« Monday Bloody Monday » ou « Me&My Shadow »,
ce qui fait qu'on retiendra finalement pas vraiment de chansons
sortant du lot, même si a posteriori, on peut penser que Her
little accident sera mémorable si on se laisse trop
influencer par le marketing de Relapse derechef. On y retrouve
finalement assez peu de gros break qui vous font manger vos dents. La
tendance est plutôt au groove à tout prix, mais un peu engoncé
malgré son odeur sulfureuse de rock'n'roll des bas-fonds qui vous
fait hocher la tête avec une moue approbatrice et virile à la Phil
Anselmo. On reste sur une impression de Unsane Meets Crowbar, avec le
hardcore bas du front en moins. La prod est aussi moins clinquante,
un peu plus ronde et ira moins cogner direct, le son vous enlacera
plutôt pour mieux s'apesantir sur vous. Au rayon des moins, je ne
peux m'enpêcher aussi de noter que le chant a franchement moins de
mordant. Du coup, on accroche moins aux compositions, sans cette
sensation d'avoir un écorché vif qui vous empoigne avec moult
fougue pour vous cracher toute sa douleur à la gueule de façon dur
mais juste.
Par contre au rayon des
bonnes nouvelles, c'est que si les compos sont moins violentes, elles
gardent un groove qui est quand même furieusement cool (la moue à
la Anselmo, vous disais-je) et que si ce disque peine un peu à
démarrer, il est fraichement kiffant sur la fin. Un plus Doom et
Stoner, on se surprend finalement à plus reconnaître du Kyuss au
détour d'un riff foutrement heavy smooth (The Sad Clown, Only
Photograph Remains). C'est d'ailleurs ce qui sauve l'ensemble de
l'infamant « disque de plus écrit en pilote
automatique ». Si on ne se prend pas une claque dès le début,
on aime à y revenir pour se plonger dans cette ambiance poisseuse et
à guetter avec gourmandises les parties de guitares qui peuvent en
remontrer à Goatsnake, quand le disque commence à prendre sa
vitesse de croisière après le milieu de l'album, les riffs nous chahutant les oreilles agréablement comme sur le pont d'un bateau avec une mer agitée.
Donc si ce n'est pas la
cuvée du siècle, Deep Cuts From Dark Clouds contentera quand même
largement les amateurs de bon riff lourdingue à la classe ultime.
C'est juste un peu dommage qu'il soit laborieux à délivrer toute sa
saveur.
A écouter : en buvant une bière épaisse