Non, le concert d'Ultra Vomit à l'Elysée n'est pas apolitique.
par Skaldmax (25/05/2021)
Chose promise chose dûe. La rencontre tant attendue de Mcfly et Carlito avec le chef de l’État a été postée sur Youtube ce dimanche 23 mai. Récompensé pour une précédente vidéo promouvant les gestes barrière, le duo comique s’est donc adonné au « concours d’anecdotes » promis par Emmanuel Macron, sur un ton détendu et complice.
Mais n’allez pas imaginer qu’il s’agisse là de politique, même à un an de l’élection présidentielle. Les deux vidéastes s’en défendaient déjà il y a quelques mois, appelant leur jeune audience à user de son libre arbitre.
De même, Ultra Vomit, qui conclut cette récente vidéo par un concert improvisé dans le jardin de l'Elysée, clamait dimanche sa neutralité. Via un statut facebook enchaînant les jeux de mots et pirouettes humoristiques, le groupe y évacue d’emblée les critiques qui pourraient leur être formulées. « Tout autre interprétation chiante à base de "tous des politiques" serait une interprétation chiante. ». Une précaution qui parle d’elle-même, laissant imaginer un léger doute des artistes quant au bien-fondé de la démarche. Il est naturellement peu probable que les fans du quatuor nantais changent subitement de bord politique après visionnage. Mais tout de même, soyons un peu chiants malgré tout.
À voir des calculs électoraux, ferait-on du mauvais esprit ? Le gouvernement Macron multiplie pourtant les interventions auprès de grandes figures des réseaux sociaux. L’influenceuse EnjoyPhoenix était ainsi invitée le 24 février dernier dans l’émission de Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, diffusée sur Twitch. Marie Lopez (EnjoyPhoenix) faisait d’ailleurs remarquer l’absence de journalistes pouvant porter une parole contradictoire sérieuse lors de ce débat au sujet de la jeunesse.
Le 14 mars, c’est au tour du Premier Ministre d’investir la plateforme Twitch en compagnie du présentateur Samuel Etienne pour une séance de questions-réponses avec les internautes. Plus tôt, en 2019, le Youtuber Tibo InShape faisait lui la promotion du SNU (Service National Universel) pour le compte de l’Elysée. Dès 2020, McFly et Carlito (encore eux) étaient soutenus par le gouvernement lors d'un live d'appel aux dons pour aider au financement des hôpitaux publics.
Soyons lucides. Sous couvert de communication gouvernementale, Emmanuel Macron a entamé auprès des jeunes une campagne présidentielle qui ne dit pas son nom, offrant au passage un échange de visibilité avec les acteurs du net qui se prêtent au jeu.
En un sens, McFly, Carlito et Ultra Vomit ont tenu leurs promesses : il est vrai qu’il n’a pas été question de politique. Les théâtres occupés et mobilisés, la réforme de l’assurance chômage (qui menace de précariser davantage les contrats courts d'intermittents), le manque de réactivité du ministère de la Culture dans la gestion de la crise n’ont pas été évoqués entre deux anecdotes croustillantes. Tout juste un clin d'œil au Hellfest de la part des vidéastes, tandis qu'Emmanuel Macron bafouille : « Ça a été dur en ce moment ». Là-dessus, bref concert, mines rigolardes sur scène comme dans le public, et puis rideau.
Bien entendu, il n’est pas exclu que les gars d'Ultra Vomit soient de bonne foi, et pensent sincèrement que leur présence n'a aucun impact idéologique. Jouer en un tel lieu est une occasion qui ne se représentera pas de sitôt, peu importe le parti au pouvoir. Cependant, avec toute la distance politique du monde et qu’ils le veuillent ou non, les musiciens ont été intégrés au plan comm’ global d’un Emmanuel Macron très probablement candidat qui voit l’échéance des urnes se rapprocher à grands pas.
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