Yellfest 2014 Chambalon

Guide Metalorgeoutard des Cévènnes Edition 2014 : Le Yellfest

Sympathique petit festival niché au cœur du Causse Méjean, il consiste en un rassemblement de gens recommandables et de groupes de Chaos Hardcore, Noise Hardcore, Sludge, Grind, Metal...

Un peu d'histoire :

Le Yellfest se créé en 2011 à l'initiative de personnalités issues de la scène metal/hardcore montpelliéraine, qui pour une raison indéterminée, s'installent dans le cadre ultra-chanmé de Chambalon, ancienne bergerie médiévale située en plein Parc National des Cévennes, Lozère, promettant des paysages de toute beauté au festivalier, si vous avez vu l'excellent film Mickeal Kholaas avec Madds Mikelsen, c'est à peu près aussi beau.
L'affiche reste assez « underground » si tant est que ce mot a encore un sens à l'ère de Facebook et de Bandcamp. Une sélection très cocorico des meilleurs groupes chaos hardcore, hardcore noise, sludge, stoner, crust et grind du moment agrémentée de dignes représentants du Royaume-Uni, de Belgique, d'Italie voir des States (Red Fang en « tête d'affiche » la première année) qui ne déméritent pas moins, promettant une gentille série de taquets faciaux en règle.
Contrairement à l'évolution moyenne d'un festival, le Yellfest n'a pas changé sa formule depuis ses débuts et reste un rassemblement guidé par l'idée du DIY et du Non-profit, une ambiance de collègues en petit comité, une fidélité au site et à son cadre d'exception. Une sorte de délice artisanal préservé des ambitions de gigantisme et de l'appétit publicitaire du lobby des spiritueux et autres profiteurs envahissants.

Où dormir ?

On trouve autour de la bergerie un hectare de bois et clairières où les pins préservent le festivalier du soleil fourbe qui d'habitude le tire de son sac de couchage dès l'aube pour cause de chaleur intenable. Camping gratuit on vous dit, avec une herbe grasse et tendre où l'on a plaisir à se rouler avec délectation, formant un matelas naturel qui évite de se niquer le dos sur de la caillasse malvenue. Pas mal donc, d'autant qu'avec la jauge limité, les fâcheux susceptibles de s'écraser sur votre tente en plein sommeil ou faire du djembé sur des boites de conserves à 7h du matin sont largement moins présents. Un seul chiotte non-chimique ni sec (!) qui suffit amplement à collecter la matière fécale festivalière, une seule douche et un seul point d'eau pour se laver, mais soyons honnête, qui se lave en festival ? Pourquoi faire ? Donc, on s'en tape et les plus maniaques de la propreté n'auront qu'à se récurer dans les gorges du Tarn à 15 minutes de bagnole.

Où manger ?

Si, jeune amateur de son qui tâche, tu as oublié d'amener ton traditionnel stock de chips, de tamboulé premier prix ou de conserves indigentes, sache que les bonnes âmes responsables de cette modeste sauterie ont pensé à ton petit estomac. Un stand de bouffe fait maison t'attend avec sandwich aux chippos, couscous et chili vegan ou pas vegan, café, frites, vin chaud, etc etc...note au passage que la nourriture du Yellfest est d'une qualité bien supérieure à toutes les merdes que tu as l'habitude d'ingurgiter dans le reste des festivals du monde entier, et pour pas cher.

Où boire un coup ?

Des rumeurs font état que l'alcoolémie du yellfesteux serait en grande partie due à une surconsommation d'alcool de plantes originaire du centre de la France, nombre de cadavres l'attestant (de bouteille hein, pas de festivalier). Cependant, le pochard moyen que représente tout amateur de métôôôl et de arrrrkooooore peut également ingurgiter moult cervoises à des prix inférieurs à ceux des débits de boissons traditionnels à celui du Yellfest, situé juste en face de la scène, ce qui est pratique si l'on veut s'humidifier tout en profitant du spectacle. Certains musiciens ont d'ailleurs leurs petites habitudes comme le chanteur de Haut et Court/Michel Anoïa qui se fait chaque année porter par le public jusqu'au bar pour s'y faire servir une petite mousse pour ensuite revenir sur scène en slam-taxi entre deux hurlements et réclamations de cassage de rotule et de pluie d'enfants morts-nés. Bières largement pas dégueu et surtout de la kwak mec, de la kwak ! Et en plus, la camaraderie régnant, tu auras sûrement la chance de te faire servir par un brave saltimbanque qui secouera sa guitare sur scène juste avant ou après, pratique si tu veux demander conseil sur quelques accords que Lucifer lui a inspiré.

A voir, A faire :

Extra-musical : Vous l'aurez deviné, pas d'attraction ni de stand divers et variés pour vous tenir occupés jusqu'au début des concerts (ça commence à 21h le vendredi, 17h le samedi). Mais vous pouvez profiter de l'attraction la plus intéressante qui soit, à savoir les superbes paysages du causse méjean, au sein duquel une petite rôde d'une heure suffira à vous en mettre plein les mirettes. Chaque année, certain ne se privent pas d'aller faire un petit coup de kayak dans les gorges du Tarn, il paraît que c'est Daggers qui s'y est collé cette année. De nombreuses parties de boules sont disputés également, vous pourrez peut-être vous y incruster. Si ces distractions de bobos vous débectent, conservez vos habitudes festivalières et resserrez les liens avec vos potes autour de quelques packs de 25 ou façon Brokeback Mountain, c'est l'occasion, l'environnement s'y prête.

Les Groupes :

Premier jour :

Feral : Premier groupe à fouler la scène, ils n'existent pas depuis longtemps et n'ont rien enregistré mais tous les membres du groupe sont de vieux briscards chevronnés ayant fait leurs armes ou exerçant toujours dans des formations réputées de la scène montpelliéraine (Stuntman, Renfield ect...). Autant dire qu'ils sont à la maison. J'avais déjà vu leur premier concert (celui-là est le second) et apprécié la qualité de leur prestation et leur professionnalisme. Après musicalement, peu de différence avec leurs autres groupes (hardcore directement influencé par Coalesce, Botch, Knut, Converge ect...). S'ils envoient du bois et une prestation aussi bonne que la première fois, j'accroche beaucoup moins, ayant déjà « défloré » le sujet et put voir quantité de formations similaires.

Warfuck : Un autre groupe que j'ai déjà vu mais auquel j'accroche beaucoup plus. Les blasts incessants, la qualité des breaks qui arrivent sans prévenir, le groove de la guitare et la colère qui se dégage du chant éructé...Warfuck assure toujours à fond un grindcore ultra dynamique inspiré par Nasum en plus furieux. Ni le batteur ni le guitariste n'ont à rattraper les caguades de l'un ou le charisme de l'autre. Le guitariste bondit un peu partout, le batteur headbangue comme un beau diable, pose les couilles sur ses fûts (c'est une image). Un set sans temps mort, qui assure à ceux qui en doutaient encore que la scène grind française comporte des groupes qui n'ont à jalouser personne au plan international.

Black Code : Si il y a bien un set qui a marqué cette soirée, c'est celui de Black Code, presque unanimement désigné comme le meilleur. Il faut dire qu'il est difficile de résister à l'imparable recette du quintet de Besançon. A la fois ultra-metal avec ses plans thrash façon rouleau compresseur, riffs et break heavy as fuck, crust à en mourir par son d-beat incessant, magma de crasse sonore et le chant glaireux de Pibe surmontant l'édifice de cambouis comme une cerise graisseuse. Je ne sais plus qui a dit « si tu as besoin de jouer la carte de la séduction c'est que ta musique n'est pas assez bonne », pour Black Code, c'est tout le contraire car très concentré dans leur jeu, ils n'ont pas besoin de discours ou de haranguer le public pour que celui-ci se montre chaud patate. La simple présence du groupe en impose royalement et le jus prend de suite.

Cowards : Si Black Code a rassemblé, Cowards a plutôt divisé, un certain nombre n'accrochant pas à la musique du groupe, les autres kiffant grave. Pour ma part, ce hardcore ultra lourdissime m'a bien plu, en particulier pour son utilisation judicieuse de riffs et larsens à la Eyehategod, mon seul reproche serait que sur la fin, la répétitivité des structures a provoqué une légère lassitude alors que le début m'avait bien enthousiasmé. L'ensemble du quintet se démène pas mal, mais l'attitude pseudo-kickback absolument pas convaincante de l'un des guitaristes (ex-hangman's chair) en aura exaspéré plus d'un qui auront décroché de l'ambiance du set pourtant bien ficelé.

Pariso : Me rappeler de Pariso m'est un peu difficile parce que j'étais bien fin ivre en plus d'avoir moyennement accroché à la musique des londoniens. Pas mauvaise, mais après le passage de Cowards, un nouveau set Hardcore méchant tendance Sludge faisait un peu redite. La sincérité de leur démarche est évidente, leur énergie vraiment présente et on sent que le groupe se donne vraiment du mal sur scène. Peut-être à force de vouloir trop jouer dans les règles de l'art du genre ont-ils manqué de spontanéité, de naturel enfin de matière quoi ! Ça ne m'aura pas vraiment secoué. Ou peut-être mon intoxication croissante aura influencé mon jugement, vu que la majorité du public a eut l'air d'apprécier.

Deuxième jour :

Reptilicus : Le reste du monde doit savoir. Il y a deux ans, à Montpellier et alentours, Verdun trustait toutes les premières parties possibles jusqu'à celles de Mass Hystéria (oui). Depuis une bonne année, c'est Reptilicus qui s'y ai mit : M.O.D, Hatebreed, Toxic Holocaust, Indian, Sublime Cadaveric Decomposition...Le reptile était là à chaque fois. Du coup, c'est peut-être bien la cinquième fois que je les vois. Il paraît qu'ils vont même jusque dans les Vosges. Ils ne sont que deux, guitare/batterie, font du bruit pour cinquante avec une mixture thrash/hardcore/crust/grind brut de décoffrage qui a l'habitude de déclencher des pogos furieux. Ce set sera moins agité, Mathieu le guitariste étant moins volubile qu'à son habitude. Zaza la batteuse, en revanche, est toujours à 500 %  avec un genou pété ne l'empêchant pas de blaster (alors qu'elle dépasse à peine le mètre et les 30 kilos, voilà pour vous, batteurs rock star bodybuildés à la con!). Le set habituel et de nouveaux morceaux y passent, c'est toujours aussi bien même si un peu moins primesautier, ils étaient probablement un peu déçu que les mâchoires ne se brisent pas par paquets de 12 dans le public, pas forcément rompu aux gladiateries que les Reptilicus ont l'habitude de provoquer.

Michel Anoïa: Entité bizarre issue de la scène grind lyonnaise, Michel Anoïa s'est récemment pourvu d'un vocaliste en la personne de celui des strasbourgeois bourrins de Haut&Court. Son charisme et son indéniable sympathie sont assurément un plus sur scène pour le groupe, mais cela cache un peu la richesse instrumentale du groupe. Michel Anoïa plaira aux amateurs de Dillinger, Fantomas et consort. Un brutal death avec des passages noise, des break jazzy et de intrusions inattendues de bossa nova (ou de samba?), les lyonnais prennent toujours tout le monde à revers. Contrairement à la plupart des groupes du fest dont on sait à peu près ce qu'ils vont jouer, Michel ne fait rien comme tout le monde. Et encore plus avec leur présence sur scène, joyeusement foutraque et désordonné où chacun bondit joyeusement à droite à gauche ou se contorsionne. Et évidement le chanteur qui envoie blague sur blague, va au contact avec le public, partage des coups à boire avec celui-ci, ambiance et comme dit plus haut, stage-dive jusqu'au bar pour se faire servir une petite bière. Ambiance bonne enfant,
tout le monde s'est bien amusé.


Remote : Tout le monde avait l'air de dire que c'était la claque. J'y étais pas, dommage.











Snodgrass : Ils jouent plus tôt finalement. Combo belge, ils tapent dans un noise hardcore plutôt revêche avec un chant râpeux qui change du hurlé. Je ne connais pas du tout mais apprécie pas mal leur prestation  un peu musclé, un peu hystérique. Ça envoie correctement sur scène, mais ils leur manquent un petit grain de folie malheureusement.

Watertank : Le principal apport de Watertank à ce fest, ça a été d'apporter une bouffée de changement musical au milieu de tout ce hardcore. Même si les influences du groupe restent dans le genre, c'est tout de même pas dans la même branche puisqu'on parle plutôt de Fugazi, Helmet, Jawbreaker, etc...et Torche bien évidement. L'avalanche stoner mélo musclé du groupe rafraîchit à fond le festival. Au delà de ça, en plus d'avoir un son massif de chez massif, les compos de Watertank font mouche à chaque fois, en particulier les passages rock'n'roll un peu mélo qui vont droit au but. Ils n'ont absolument pas volé leur récent buzz. Comme leur modèle Torche, Watertank s'affirme autant voir plus sur scène que sur disque envoyant au public une énergie communicative. On sent que tous les membres du groupe ont grave de la bouteille et assurent le job haut la main. Hé les mecs, vous repassez quand vous voulez.

Lodges : Après la pause Watertank, je redoutais un peu que Lodges nous remettent trop rapidement dans le bain Chaos Hardcore, genre un peu trop présent sur ce samedi. Doutes balayés en un morceau par un groupe qui sait ce que « jouer méchant » veut dire. L'influence Holy Terror des Parisiens est évidente, les riffs tranchent sans ménagement dans le gras et les rythmiques cognent sans plus de distinction. Lourd, bourrin, sans pitié, le Hardcore de voyou de Lodges remporte également les suffrages de la foule qui aura mit peu de temps à s'immerger dans leur son.

Rvines : Le professionnalisme qui me caractérise m'aura empêché de voir le set de Rvines pour des raisons fortement contestables.

Daggers : Daggers ne font pas que du kayak, ils font aussi un Hardcore crasseux et râpeux qui colle à la peau.
Comme beaucoup d'autres groupes aujourd'hui, je suis assez impressionné par le niveau de professionnalisme de ces gars qui n'ont pas grand chose à envier en terme scénique ou musical à bon nombre de formation qui occupent les mainstages sur les gros rassemblements d'été. Comme Lodges, Daggers fait le job à fond en donnant un sens au mot hardcore.



Fange : Dernier groupe à fouler la scène du Yellfest, Fange commence bien son set avec un son de guitare que le seul qualificatif de « porc » ne suffit pas à décrire. Une porcherie entière sonne comme le doux babille d'un nouveau-né à côté, et envoie le début d'Eye for An Eye d'Entombed en guise de balance. Également : les toms du batteur ne semblent n'être rien d'autre que deux moitiés de grosses caisses. Rajoutons à ça que leur chanteur n'a pu faire le déplacement et qu'il est remplacé par le boss de Throatruinner, également chanteur/dévastateur de chez Calvaiire, dont les poulains sont aujourd'hui ici en force, chacun accroche sa ceinture bien solidement.
Le déferlement attendu est au-delà de nos espérances. Doom de sanglier qui racle jusqu'au cœur la roche du Causse Méjean, Fange balance l'intégralité de leur EP Poisse comme on fonce avec un camion dans la foule. La folie furieuse de Matthias fait merveille, sautant et se jetant de partout, c'est probablement celui qui aura le plus sorti ses tripes de tout le fest. La douleur de la musique se lit sur son visage, pas de surjeu chez lui, ni de déjà vu hier et revu le lendemain. Un concert totalement unique où la sauvagerie de chaque instrument vient écraser les résistances du public qui se lâche complètement. Set de luxe qui remporte toutes les faveurs, une conclusion en chaos et sauvagerie de haute qualité qui sied parfaitement à ces deux jours.

Que retenir ? :

Le Yellfest peut se résumer comme un écrin. Les conditions y sont vraiment très très peinardes : pas de chaleur à crever, rarement de la pluie, air frais, paysage qui tue et calme jusqu'au début des concerts, pas de foule immense. Le mot qui convient à ce fest est le confort et pour peu qu'en plus on soit venu avec force collègues (comme moi), c'est presque plus un week-end entre potes qu'un fest. D'autant qu'avec le comité restreint (limité à 300 personne je le rappelle, pour 165 présents cette année), il est facile de lier connaissance et de se faire de nouveaux potes, vu que presque tout le monde se connaît.
Musicalement, on regrette un peu la trop grande homogéneité du line-up (trop de chaos hardcore/noise hardcore, soyons clair) qui peut se révéler vraiment lassante. Cependant, relativisons : il n'y a eu aucun mauvais groupe, ni aucun mauvais set. Tous les concerts ont été bons voir très bons et aucun pépin technique n'est à noter, le tout pour 20 euros...On ne peut pas vraiment se plaindre.



Crédits photographiques : Sylvain Cabannes pour le Yellfest/2014

Garik (Septembre 2014)

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Commentaires

MegaMotörFlamesLe Dimanche 21 septembre 2014 à 17H20

Ca à l'air assez énorme, très bon article qui donne vraiment envie d'aller jeter une oreille !
Thankx ;)