Ulver, Stian Westerhus (Machine du Moulin Rouge, Paris) 19/11/2017

Les loups sont des créatures sauvages, mais qu’on peut apeurer facilement. 

Cela faisait depuis 2011, tout juste avant la sortie de Wars of The Roses, qu’Ulver n’étaient pas passés à Paris. Pour la France, point de concert pour Childhood’s End, point d’apparition avec un orchestre pour Messe I.X–VI.X et pas de jams improvisées pour ce qui allait devenir l’album live/studio hybride ATGCLVLSSCAP. Le fan d’Ulver a donc dû prendre son mal en patience, et attendre qu’enfin, une tournée européenne passe par l’hexagone, en soutien de The Assassination of Julius Caesar et l’EP Sic Transit Gloria Mundi, deux sorties qui ont marqué 2017.


Stian Westerhus 


Stian est un artiste protéiforme, un peu comme ses compagnons de label d’Ulver. Il a notamment joué avec le groupe d’electro-jazz norvégien Jaga Jazzist et s’est également illustré sur une brochette d’albums solo, en plus d’être invité sur deux albums d’Ulver, dont The Assassination of Julius Caesar. Il nous livre ici une performance solo expérimentale, qui vient flirter avec le drone et l’improvisation. A la guitare, Stian triture son signal avec moult pédales d’effet, notamment des delays et des loopers qu’il utilise comme de la pâte à modeler pour créer sa musique sur scène. Jouant aussi bien aux doigts qu’à l’archet, ses compositions tiennent plutôt bien la route. 



Au chant, il révèle une voix aux capacités assez exceptionnelles, pouvant monter très haut dans les aigus sans aucune difficulté, et avec justesse. Le ton que le guitariste prend au chant rappelle coïncidence ou non beaucoup Scott Walker, qui est un peu le père de l’avant-garde et de l’expérimental dans le rock. La musique de Stian Westerhus est donc bien éloignée des clichés standards du rock, mais est surtout très bien agencée, et c’est peut-être pour cela que sa performance arrive à convaincre. Ceci dit, il n’est pas impossible que l’ennui ait pu pointer le bout de son nez s’il avait joué plus d’une demi-heure.

Ulver

La première de ce nouveau set d'Ulver au Roadburn après trois ans d'absence de la scène, pour fêter la sortie du dernier album, avait marqué les esprits, d'abord par l'adaptation remarquable du registre new wave à la scène par les musiciens, mais aussi grâce à un jeu de lumières très travaillé. Ce soir à Paris, ils vont transformer l'essai, en l'améliorant. Commencer le set sur "Nemoralia", c'était presque céder à la facilité. Mais d'un autre côté, comment entamer un concert d'une meilleure façon qu'avec ce rythme simple et efficace, qui fait instantanément hocher de la tête toute personne dotée d'une âme ? Les claviers analogiques de Tore Ylwizaker chantent, la voix de Garm est au rendez-vous en plus d'être globalement juste, que demander de plus ? 



Nous avons donc droit à une interprétation complète d'Assassination of Julius Caesa et Sic Transit Gloria Mundi, avec parfois de nouveaux arrangements par rapport aux versions studio, que certains pourraient même trouver meilleurs que les originaux. Affaire de goût dirons-nous, mais le fait que ces habillages conviennent particulièrement bien à la scène. 



En plus de diablement bien jouer, Ulver ont apporté des lasers (normalement interdits en France du fait de leur puissance) avec eux. Et il est difficile de décrire le jeu de lumière qui en découle avec des mots qui lui rendrait pleinement justice, il faut voir des vidéos ou a fortiori aller à un concert d'Ulver pour s'en rendre compte. Disons qu'on sent bien qu'énormément de travail est allé là-dedans, et qu'il est rare de voir un light show aussi classe, que ce soit avec les lasers pointés au-dessus du pubic ou ceux qui tracent des formes sur l'écran derrière le groupe.


Parmis les (nombreux) moments forts du set, on peut relever "So Falls The Word" avec sa ligne de piano simple et efficace dans le plus pur style Ylwizaker et une partie chantée mélancolique par Garm. Le rythme dansant de "Bring Out Your Dead" est d'une efficacité terrible, et on se surprendrait presque que personne ne danse dans la Machine, s'il ne s'agissait pas du public affilié black metal d'Ulver. Enfin, il y a la version étendue de "Coming Home" avec un jam qui nous renvoie aux années 70. Ironie du sort, Garm avait déclaré à la Cigale en 2010 qu'ils n'étaient pas un groupe qui fait des rappels. Sept ans plus tard, c'est pourtant ce qui se passe devant nous, avec la reprise superbement "ulverisée" de "The Power of Love". Ainsi, les loups ont, une fois de plus, réussi leur pari, et même si c'est avec un sentiment de satiété qu'on sort de la salle, quelques "tubes" de Perdition City ou de Shadows of The Sun n'auraient pas été de trop. Peut-être qu'ils le feront dans quelques années, qui sait ?

Remerciements à Garmonbozia Inc. pour la date !





Neredude (Novembre 2017)

Photos : Arnaud Dionisio / © 2017 Deviantart
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