Carnifex Trix Anvers, le 05/11/2016

Interview de Carnifex, avec nous Scott Lewis (vocaliste) et Fred Calderon (basse)
Cette interview a été réalisée le 5 novembre, avant l'élection américaine.

Je me rappelle la première fois que j'ai entendu parler de Carnifex c'est un pote geek, pas du tout Metal qui a mentionné le nom, du coup je croyais que c'était un Pokémon. D'où vient le nom en réalité ?

(rires)

Scott : C'est en fait un terme latin qui veut dire bourreau et dans les âges sombres de l'Histoire quand quelqu'un était reconnu coupable d'un crime contre l'église, comme par exemple ne pas être d'accord avec eux, c'était le Carnifex qui s'occupait de les exécuter. Et c'était un nom qui sonnait bien et qui n'était pas déjà pris donc c'est pour ça qu'on est partis là-dessus. C'est aussi un nom de personnage dans Warhammer.

Le Never Say Die Tour 2013 a été la première annonce que vous avez faite après votre hiatus en 2012. Revenir sur cette tournée doit avoir une saveur particulière pour vous ?

Scott : Oui, c'est notre troisième participation au Never Say Die Tour, ils étaient tous bien et ils sont tous spéciaux. Par chance on nous a sollicités pour participer à nouveau et on a tout de suite accepté. En plus cette année, c'est le dixième anniversaire du tour, on a participé au deuxième en compagnie de Parkway Drive.

Fred : C'est aussi la première tournée qu'on a fait en Europe et en dehors des Etats-Unis donc c'était déjà particulier à l'époque pour nous.

Scott : On se sent bien sur cette tournée, c'est seulement la troisième journée mais jusqu'à présent les shows se sont tous très bien déroulés, et ça fait environ un an qu'on n'était pas revenus en Europe vu qu'on a pas mal tourné aux Etats-Unis.

Depuis votre hiatus en 2012 vous avez sorti deux albums, Die Without Hope et Slow Death, avec de nouvelles influences et de nouvelles sonorités. Est-ce que cette évolution faisait partie des conditions quand vous vous êtes reformés ?

Fred : on ne s'est pas reformés, c'est juste qu'on a fait une pause dans les concerts en 2012.

Scott : En fait s'il y a des différences stylistiques avec les anciens albums ce n'est pas du au fait qu'on a de nouvelles influences, c'est simplement du au fait qu'on arrive mieux à s'exprimer. On a également trouvé les gars qu'il nous fallait pour réussir à élever le groupe à la prétention qu'on avait et si on a fait une pause d'un an, c'est justement pour faire le point et réussir à exprimer exactement ce qu'on voulait maintenant qu'on était plus affirmé dans notre statut.

Fred : et ça nous a permis également de prendre du recul pour savoir comment mettre en avant notre nouveau son, quelles tournées on préférait faire et le meilleur moyen pour nous de toucher le plus de nos fans. Mieux gérer tout ça au lieu de perdre du temps, au moins la on profite à fond d'être en tournée et on s'éclate !

Je vous être honnête avec vous, je n'ai pas encore pu me procurer Slow Death, mais j'ai vu les clips issus de l'album et ça sonne carrément plus Black Metal qu'avant. Est-ce que vous êtes en train de vous orienter vers du Blackdeathcore ?

Scott : Oui, c'est quelque chose qui revient souvent. En fait on n'est pas plus Black Metal qu'avant c'est juste comme je le disais précédemment qu'on arrive mieux a articuler notre son sur nos influences et le Black a toujours fait partie des trucs qu'on écoutait.

Fred : En fait, plus le groupe évolue, plus on est en phase sur ce qu'on aime et plus c'est facile pour nous d'être précis dans ce qu'on fait.

Scott : Pour le style, en fait on ne s'est jamais posé la question, même à nos débuts. Est-ce que c'est du Deathcore ? Ça n'existait même pas à l'époque ! On ne s'est jamais souciés non plus de comment en sonnait. Il y a définitivement des éléments Black Metal dans ce qu'on fait mais on laisse les auditeurs juger et apprécier ce qu'on fait.

De quoi parle Slow Death ?

Scott : J'écris toujours mes textes d'un point de vue personnel. Même si je ne parle pas de quelque chose que je vis au moment ou j'écris, c'est plutôt personnel. Des choses qui se sont passées, une réflexion personnelle sur un sujet tiers… Des sujets reliés à nos fans et auxquels ils sont sensibles. Ce n'est pas de la violence débile et inerte que l'on fait comme beaucoup font dans le Deathcore. Beaucoup font des paroles gratuites, ils mettent des mots les uns après les autres pour que ça sonne "evil" et que ça passe bien au micro. En fait ils agencent des mots sans aucune profondeur, c'est tout. Dans Carnifex ce n'est pas le cas, et j'espère que ce n'est pas perçu comme ça. J'essaye toujours, comme je disais, de personnifier mes textes et d'avoir un certain aperçu des choses qui reflète ce que le groupe est en réalité. Quand j'étais enfant, j'avais un attrait particulier pour des groupes comme Nine Inch Nails qui avait des ambiances et paroles sombres. Quelque chose dans ces textes torturés me touchait et me faisait dire "Wow, je ne suis pas le seul qui ressent ça…" et c'est ce que je m'évertue à faire avec nos textes.

Vos derniers clips sont très recherchés et très bien réalisés. Est-ce que vous êtes des aficionados du cinéma hollywoodien ?

(rires)
Scott : touché ! Oui absolument ! En fait pour les deux dernières vidéos on a fait un travail particulier. On a essayé de rendre la vision exacte de ce qu'on voulait, pour que la vidéo soit parfaitement en accord avec la musique et soit notre concept de A à Z. Beaucoup de réalisateurs voulaient nous imposer leur style, leur empreinte, leur vision des choses alors que nous voulions tout contrôler pour exprimer précisément ce que nous voulions. On est donc entré en contact avec pas mal de monde, certains noms plutôt connus, mais avec cette optique d'avoir cette liberté totale sur la création. Et au final on est tombés exactement sur les gars qu'on recherchait, qui nous filait des coups de mains avec ce qu'on ne maîtrisait pas et qui nous ont laissé nous exprimer sans apporter une vision autre que celle du groupe.

Quels sont vos films préférés ?

Scott : David Fincher est mon réalisateur préféré donc je dirais Seven, Fight Club, Zodiac...

Zodiac vraiment ?

Scott : Ben … j'aime bien Jake Gyllenhaal et Mark Ruffalo aussi, donc le réalisateur plus le casting ça joue. The Game aussi, en fait j'aime bien les films avec une certaine réflexion.

Vous qui êtes là depuis le début du Deathcore, comment décririez-vous l'évolution de ce style ?

Scott : En fait quand on a commencé le mot Deathcore n'existait pas. Vers août 2005 en tout cas j'en avais jamais entendu parler. Au début on était quelques groupes de Californie du sud à avoir défini ce style, il y avait nous, As Blood Runs Black et Suicide Silence.

The Acacia Strain aussi non ?

Scott : Alors j'aime beaucoup The Acacia Strain mais je ne les ai jamais vu comme un groupe de Deathcore. Déjà c'est un groupe de la côte est et ils correspondent plus à la scène Hardcore, d'ailleurs ils tournaient principalement avec des groupes de Hardcore. Si on prête attention a leur album 3750, qui est excellent, on remarque qu'il n'y a pas de blasts. Je ne veux pas les discriminer, et j'aime beaucoup ce qu'ils font, c'est juste que pour moi ce n'est pas du Deathcore. Je pense que même eux ne se revendiquent pas de ce style. Je pense que la toute première vague qui a inspiré le Deathcore qui était d'ailleurs particulièrement impopulaire, c'était Despised Icon, Suffocation, Dying Fetus, Cryptopsy chez les canadiens, et ensuite il y a eu la vraie première vague avec Suicide Silence, As Blood Runs Black et nous. Et un an et demi après peut être il y a eu une énorme deuxième vague avec plein de groupes tel que Whitechapel et ils ont décidés qu'on allait s'appeler le Deathcore (rires) et la je me suis dit, qu'on allait être le style à la mode et que tout le monde allait nous détester à cause de ça. Mais onze ans plus tard, maintenant c'est Suicide Silence, Whitechapel et nous qui menons la danse.

Fred : Oui on peut rajouter aux quelques autres noms de groupe qui n'ont jamais vraiment été connus et qui malheureusement maintenant n'existent plus, et qui ont participé à la création de ce style avec nous. Après pour tous les groupes à partir de la deuxième vague c'est plus simple ils s'inspirent de nous, le sillon est déjà tracé, et quelque part c'est eux qui ont fait les premiers du Deathcore, qui ont mis l'étiquette sur ce qu'on faisait, et qui s'en sont inspirés pour définir notre style.

Est-ce que du coup vous vous sentez prisonniers d'un style qu'on vous a quelque part imposé ? Alors qu'avant vous étiez des électrons libres ?

Fred : non, parce qu'on a continué à faire ce qu'on faisait déjà avant qu'ils arrivent tous. Si tu fais attention à notre tout premier album, il y avait déjà toutes les clés qui ont défini le style .

Scott : en fait la nuance vient se faire sentir de la manière suivante. Comme on était la première vague on n'avait aucun groupe de Deathcore pour nous inspirer. On est partis de ce qu'on aimait bien, Suffocation et Cannibal Corpse d'un coté, et the Black Dahlia Murder et Despised Icon de l'autre et on a rapproché les deux pour se faire confronter les genres. Pour la deuxième vague, ils se sont inspirés de Carnifex et des autres groupes de la première vague et c'est ça la grande différence entre eux tous et nous, et je pense que cette force créatrice c'est une des raisons qui font qu'on est toujours ici et que plein d'autres groupes de Deathcore des vagues suivantes n'existent plus. On avait une intention authentique à la base, et je pense qu'on l'a toujours et c'est ce que les gens apprécient.

Beaucoup de groupes refusent l'étiquette Deathcore, vous ce n'est pas votre cas, comment ça se fait ?

Fred : ça dépend beaucoup de la perception et des étiquettes, il y a des groupes qui se rapprochent d'un style ou qui veulent s'en rapprocher d'un, comme par exemple en Metalcore, c'est plutôt vague comme description au final, et il y a pas mal de gens qui écoutent et qui confondent. Qui ont tendance a catégoriser ça, ou ça ou ça en Death ou Metalcore alors que l'intention du groupe n'est pas celle là à la base.

Scott : En fait le truc c'est qu'on n'a jamais eu ce genre de discussions entre nous. On ne s'est jamais réunis pour s'asseoir et discuter si on est Deathcore ou autre chose. D'autres le font, le public, parfois d'autres groupes, on l'a déjà entendu, "il faut un passage Deathcore là". Ce genre de truc n'arrive pas chez nous.

Vous êtes juste vous-mêmes et ne vous souciez pas d'étiquette en fait.

Scott : C'est pas important pour nous en fait, si quelqu'un nous dit "vous êtes Death Metal", alors on est Death Metal... (rires) d'ailleurs il s'est passé un truc marrant pendant le Summer Slaughter Tour. Y'a un gars qui est venu nous voir et nous dit "Vous êtes le premier groupe de Black Metal que je vois et j'ai bien apprécié" (rires) et dans ma tête j'étais "WTF man ??! Sérieusement ?!!"  Et je lui ai dit " Merci beaucoup l'ami". (rires) Tout ça pour dire que les perceptions de tout un chacun sont différentes et qu'on ne se prend vraiment pas la tête avec ce genre de considérations.

Fred : Souvent sur internet on voit des gens qui se disputent pour dire que tel ou tel groupe est plutôt dans tel ou tel style, mais il faut qu'ils sachent que les groupes n'en ont rien à foutre d'être catégorisés et ce n'est pas leurs commentaires méchants qui y changeront quelque chose.

Quel est votre album préféré d'Obey The Brave et pourquoi ?

Scott : Obey The Brave ? Hum … le dernier Salvation ? C'est ça ? J'aime bien car certaines chansons restent en tête. C'est efficace.

Vous revenez tout juste du Straight Outta Hell Tour aux Etats-Unis. Quel est le meilleur public entre le public américain et l'européen ?

Scott : On nous pose souvent la question et j'ai une réponse toute faite pour ça : Un fan de Carnifex et un fan de Carnifex. Peu importe où il soit né. En fait le public varie plus en fonction des tournées. Là comme pour le Straight Outta Hell, c'est un public Deathcore. Au Summer Slaughter, avec Nile, Cannibal Corpse, c'est un public plus vieux, de death metalleux et donc pas la même ambiance. Pour nous une tournée Deathcore c'est ce qu'il y a de mieux, parce que forcement c'est notre public.

Fred : La tournée du Never Say Die la est particulièrement intéressante pour nous, parce qu'il y a du Deathcore et du Hardcore et les styles se complètent pas mal, ça apporte une énergie en plus dans l'audience, et ça permet d'élargir un peu les gens qu'on touche avec notre musique.

Quelle est votre meilleur souvenir de live ?

Fred : C'était au Full Force en... 2013 ou quelque chose comme ça.

Scott : Ouais !

Fred : On a joué devant un public gigantesque, on n'avait jamais vu autant de monde et un public aussi déchaîné.

Scott : Oui et ce qu'il y avait d'excellent aussi, c'est qu'on jouait juste avant Abbath, Meshuggah et Rob Zombie, donc pour nous une affiche géniale. Je me rappelle qu'on a joué et on a été rapidement prendre une douche pour aller voir les groupes qui jouaient juste après nous. On a adoré les voir depuis les coulisses. C'était vraiment un très bon souvenir. Une journée particulière.

Comment expliquez-vous que les américains vont massivement voter pour Trump et Clinton alors qu'ils les détestent absolument et qu'il y a d'autres candidats dont les média extérieurs aux Etats-Unis ne parlent jamais, existent bel et bien et ont des programmes au moins aussi crédibles que les démocrates et républicains ?

Scott : Et bien... je pense que malheureusement... en pratique on peut voter pour l'un des deux autres "grands" candidats, pour un petit candidat ou même écrire le nom qu'on veut sur le papier, mais en réalité il n'y a tristement que les partis démocrates et républicains qui peuvent être élus. Ils ont a l'heure actuelle chacun 45 % des voix et tous les autres partis se disputent les 10 % restants. Aujourd'hui, on ne pourra rien n'y faire... c'est comme ça. Peut être qu'un jour, surement après cette élection là d'ailleurs, les choses vont changer. Mais on a été habitués à avoir aux Etats-Unis des partis de gauche et de droite très faibles et très peu présents. Culturellement c'est le bipartisme qui l'a toujours emporté chez nous. Peu importe le programme et les intentions des autres partis, qu'on adhère ou non à leurs idées d'ailleurs, les gens ne voteront pas pour eux. C'est culturel !

Fred : Chez nous le troisième parti doit avoir quelque chose comme 2% des intentions de vote.

C'est assez compliqué de s'imaginer ça, car en Europe on a grosso modo cinq partis qui sont au dessus des 5 %, la gauche, la droite, le centre et les extrêmes. Ça permet d'ailleurs de voir en Europe, la montée de l'extrême droite.

Scott : aux Etats-Unis c'est le cas également ! Il y a de plus en plus de fascistes !

Pour qui votent-ils alors ?

Scott : Pour Trump !

Pour toi Trump est carrément fasciste ?

Scott : Oui, absolument... C'est un système désuet qu'on a là-bas, mais malheureusement c'est la réalité, un milliardaire fasciste peut prendre en otage un parti, gagner les primaires et s'imposer comme le choix de tout un pan. Peut-être qu'en 2020, il y aura un troisième parti, plus viable et populaire qui saura empêcher d'avoir le choix entre la peste et le choléra mais pour aujourd'hui c'est mort… Les gens ne sont pas prêts.

Pour la dernière question on inverse les rôles c'est vous, Carnifex qui posez une question aux lecteurs de Metalorgie.

Scott : On parle souvent du meilleur, mais quel est le PIRE album Metal que vous n'ayez jamais entendu ?

Haters, celle là elle est pour vous, répondez à Carnifex !

Maxwell (Novembre 2016)

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