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Biographie

Tesseract

Les anglais de Tesseract se sont dans la scène Métal au début de cette nouvelle décennie. Actuellement formé de cinq musiciens (Daniel Tompkins – chant, Acle Kahney – guitare, James Monteith – guitare, Jay Postones – batterie, Amos Williams – basse et chant), Tesseract est un projet que les musiciens décrivent comme ambitieux, artistiquement complet et inspiré.
Le projet est né en 2003 de l’esprit d’Acle Kahney, qu’il écrit et auto-produit entièrement. En tant que producteur-interprète « à la maison », Kahney met en ligne ses compositions, et reçoit les encouragements de Fredrik Thordendal, guitariste de Meshuggah.
Quelques années plus tard, en 2009, la sortie de l’ep Concealing Fate est reçu et considéré comme une pointure du métal progressif par une partie de la presse (Metal Hammer, Classick Rock Presents, Terrorizer, Scuzz). Le groupe finalise son line-up deux ans plus tard, avec l’arrivée de leur nouveau chanteur Daniel Tompkins, reconnu pour sa voix puissante en clair et ses cris perçants. Il apporte à Tesseract une nouvelle dimension, en associant une émotion éthérée de brutalité.
Le 23 mars 2011 sort l’album One sur Century RecordsTesseract engage volontiers les combinaisons d’ambiances, composant au moyen de nuances complexes une atmosphère hypnotique, approchant la tendance Rock et Métal Progressif. On associe le nom à une structure géométrique complexe, imbriqué deux cubes l’un dans l’autre.
Tesseract promet de grandir, épaulés par leurs pairs Meshuggah ou encore Textures.

15 / 20
3 commentaires (15.5/20).
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Sonder ( 2018 )

Si vous nous lisez depuis suffisamment longtemps (ou si vous scrollez pour (re)lire la chronique d'Errai, ci-dessous), vous êtes conscient des doutes entretenus quant au tournant de la musique de Tesseract marqué par l'EP de 2016. Les Britanniques nous ont entendus, et les expérimentations popisantes en question semblent bel et bien rester des exceptions. Sonder, le nouvel album du combo, renoue en effet avec le son typique de Tesseract, mais apporte aussi son lot de nouvelles critiques.

Mais ménageons-nous, et commençons par les bonnes nouvelles. Le son massif et subtil, syncopé et délicat, entre Post-Progressif et Ambient Djent, caractéristique des Anglais est donc à nouveau d'actualité. Tesseract est plus que jamais un groupe unique, mariant des structures déconstruites et pleines de groove, avec une précision d'exécution hors du commun et une sorte de douceur aérienne incomparable. Ainsi, la formation continue de s'inscrire dans une lignée qui dépasse le Prog ou le Djent, vers quelque chose d'encore peu défini et donc de foutrement intéressant. On offrira une mention spéciale à King, à Smile, et surtout à Juno et à son énorme riff, pour avoir réussi avec brio la mise en oeuvre de cette dichotomie stylistique (bien qu'elle soit présente aussi dans tous les autres titres à l'exception d'Orbital qui se concentre sur la facette éthérée du groupe). Non seulement on retrouve le son propre à Tesseract, mais en plus le ton est parfois plus affirmé, plus rentre-dedans, que dans Polaris. Daniel Tompkins se remet à crier (King, Smile) et le fait de façon au moins aussi qualitative que l'étaient ces types de chant sur les deux premiers opus. Après les tâtonnements artistiques d'Errai, qui eux-mêmes succédaient justement à un Polaris dénué de hurlements, Tesseract rééquilibre la balance.

Et pourtant, malgré ces efforts notables (et qui justifient la note associée à cette chronique, en dépit du défaut majeur qu'on va évoquer), Sonder est loin d'être un album parfait à cause d'une seule chose : sa gestion du temps. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : un album court n'est pas une mauvaise chose en soi. Mais un disque court se doit d'être un condensé, un concentré, sans remplissage ni artifice. Le cru 2018 des Britanniques dure 36 minutes, et est pourtant truffé de creux d'intensité, de temps morts, et de ventres mous. Beaucoup des titres nécessitent des passages qui servent à construire une apogée, qui est autant jouissive lors de son déclenchement qu'elle fut laborieuse à mettre en place. A titre d'exemple, et à l'image de toute la galette, l'énorme pavé Beneath My Skin / Mirror Image (qui représente un tiers de la durée de Sonder) éclate à 4'08 pendant environ une minute et demi, puis une nouvelle phase de "build-up" se met en place jusqu'à un second climax à 9'28, qui ne dure pas plus longtemps que le premier.
Certes, ces phases "calmes" sont le pendant naturel des parties bourrines toutes en syncopes, une dualité dont l'éloge a été faite il y a quelques lignes. Et pourtant, Sonder semble parfois aller trop loin dans ses transitions. Tesseract arrive a insuffler un aspect aérien à ses passages les plus Metal, et par conséquent, on souhaiterait aussi que la réciproque soit vraie : que les passages les plus légers aient plus de dynamique. Mais 36 minutes pour sept morceaux, dont un monstre de 11'21 et deux pistes en dessous des 2'40, des phases molles, des titres à intro, nécessitant des phases transitoires entre les temps forts, c'est peu, c'est déséquilibré, c'est décevant. Sonder fait l'effet d'un EP parfait qui aurait été étiré pour atteindre la limite minimale pour le transformer en long format. Dommage.

Bien que la joie de retrouver ce style si particulier soit altérée par la forme prise par cet opus, Tesseract n'en reste pas moins une formation essentielle à l'évolution et à la transformation du Metal moderne, et le prouve encore avec des titres chargés d'émotions et de points forts (entre les transitions). Sonder laissera probablement les fans sur leur faim. Mais les forces de cette production dépassent ses faiblesses, et on y revient, on y revient, tentant de se rassasier de cette livraison délicieuse et frustrante. Et cette attraction irrépressible, tout comme la balance fragile entre puissance et moments d'attente, participe indirectement à la magie et au mystère de Sonder. Même s'il aurait pu peut-être être mieux tourné, Tesseract accouche d'un disque déjà colossal.

A écouter : Luminary, King, Juno, Smile, The Arrow.
10 / 20
1 commentaire (14/20).

Errai (EP) ( 2016 )

Au début, Tesseract faisait du Djent. Les Anglais étaient vus comme les cousins de Meshuggah en un poil plus sages, à l'instar de Textures et de tant d'autres. Ça growlait même un peu, à l'époque, si si. Puis assez vite, le groupe a pris un tournant intéressant et orienté ses productions vers un Metal Progressif massif et mélodique à la fois, conservant les influences Math / Djent dans ses rythmiques inventives et syncopées, mais introduisant énormément d'émotions à travers des compositions parfois aériennes et un chant quasi-exclusivement en clair, brillamment maîtrisé d'ailleurs. Polaris, point culminant de la carrière de Tesseract, est l'apogée du parcours qui a amené les Britanniques à créer leur son, qu'on pourrait qualifier de Djent Ambiant.
 
En septembre dernier, Tesseract sortait Errai, qui justifie le rappel sur l'historique du groupe car cet EP marque un pas de plus vers une évolution artistique qui quitte petit à petit les rivages du Metal et des musiques extrêmes pour se rapprocher d'une dimension Pop. Pop, sérieusement ? Oui ma bonne dame, j'assume : me voilà en train de décrire Tesseract comme de la Pop, et j'oserai même presque le terme Electro-Pop.
 
Errai contient quatre titres issus de Polaris, tous retravaillés et redéfinis au point d'être réellement différents, même si les quatre morceaux se reconnaissent grâce aux lignes de chant, vraiment mises en avant dans Errai (la plupart des parties instrumentales ont été coupées, ces versions sont ainsi toutes plus courtes que les pistes initiales de Polaris). On note quand même avec plaisir que l'EP s'auto-justifie par l'écart entre les deux versions de chaque titre. Les morceaux issus d'Errai sont radicalement différents de ce qu'on connait déjà, il ne s'agit ni de remixes ni de démos, mais bien de nouvelles déclinaisons d'ancien titres, réenregistrés pour l'occasion. On a vraiment là quatre quasi-inédits, et c'est le bon point de l'objet.
 
Mais malgré cette bonne volonté de la part de Tesseract pour nous offrir quelque chose d'original, cet EP aura du mal à passer l'épreuve de l'écoute haut la main. Exit les rythmiques saccadées, les basses groovy, les sons de guitare lourds et tranchants. Ce qui est probablement le pire, c'est qu'après deux ou trois écoutes, en cherchant des repères connus, on se rend compte que même la batterie est devenue binaire. Rien à voir avec le jeu d'une précision incroyable et d'un groove colossal que l'on retrouve encore un an en arrière sur Polaris. Tout ce qui était technique a disparu, en dehors d'un solo aérien ajouté dans Seven Names ; tout ce qui était Metal est oublié, à part un léger soubresaut d'énergie sur la seconde moitié de Tourniquet.
 
En lieu et place du Djent Atmosphérique auquel Tesseract nous avait fait prendre goût jusqu'alors, le groupe propose une soupe Pop avec beaucoup d'arrangement de claviers, peu de basse, et un chant vraiment en relief, autant par les prouesses vocales du chanteur Daniel Tompkins (dans Survival surtout) que par sa place dans le mix. Et alors ? Est-ce raté ? De mauvais goût, peut-être ? Même pas. Malgré un côté répétitif et lancinant qui fait que 18 minutes sont bien assez, Errai se place comme un EP acceptable dans le style Pop Ambiant, presque une réussite. Simplement, ce n'est pas ce qu'on attendait d'un groupe qui a inventé un style et qui en est la figure de proue. Pourquoi mettre de côté ce qu'eux seuls (ou presque) savent faire, pour commettre une musique déjà entendue mille fois, qui flirte avec le fade et le manque de confiance ?
 
Au final, à part pour servir d'introduction à Tesseract pour quelqu'un de réfractaire au Metal, Errai n'a que peu d'utilité pour le die-hard fan. Peut-être que découvrir les versions initiales après celles issues d'Errai pourrait être constructif ? En attendant, on espère qu'il ne s'agit là que d'un détour, d'une récréation, et que le prochain LP des Anglais sera à la hauteur des précédents albums, Polaris et Altered State en tête.

A écouter : Une fois.
14.5 / 20
4 commentaires (15.25/20).
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Polaris ( 2015 )

Polaris est chargé d'influences assumées et bien digérées. La poésie d'Opeth, les moments forts de Periphery, un son entre Tool et Animals As Leaders... Tesseract livre ici un album plein de repères et en même temps original, assimilant toutes ces références dans le style qui leur est propre.

Les Britanniques proposent donc ce curieux mélange, que l'on pourrait qualifier de "djent doux". Certes, leur son peut se révéler massif, comme dans Dystopia, mais globalement force est de constater que Tesseract agit avec finesse, avec mesure. Presque tout dans Polaris n'est qu'émotion, et cela passe avant tout par le chant. Là où les groupes de djent ou de metal progressif (on parle plutôt de Meshuggah que de Dream Theater, bien entendu) jouent sur une dualité entre des voix growlées et chantées, Tesseract se démarque en utilisant quasi-exclusivement du chant clair. Même dans la hargne, Daniel Tompkins est mélodieux (les fins de Messenger ou d'Utopia), et les rares instants qui sont réellement hurlés n'en sont que plus intenses (Cages).

La subtilité de cette galette passe aussi par les musiciens. Ils semblent avoir compris que ce qui n'est pas joué est aussi important que ce qui l'est : rarement les guitares auront été aussi discrètes sur un disque de métal moderne. Les riffs mélodiques sont peu présents, la musique de Tesseract n'en a pas besoin. Les Anglais montrent plutôt leur technicité au niveau rythmique, très riche. Sur ce plan, tout groove, strictement tout, grâce une vraie mise en valeur de la batterie mais surtout de la basse, lourde et vivante (le pont après le premier couplet d'Utopia, et tant d'autres passages).

Il faut par contre reconnaître des faiblesses à Polaris, évidemment liées au postulat qui forge la base du disque. A vouloir trop faire dans le sensible, certaines pistes deviennent un peu mièvres, telles que Phoenix ou Tourniquet. Les morceaux les plus aériens peuvent rebuter le "trve métalleux" qui n'y verra qu'une démonstration vocale, certes joliment exécutée, mais loin du genre math-djent où Tesseract va chercher ses sources. A l'inverse, un public en manque de musique à fleur de peau, chargée de beauté fragile, considérera Polaris comme un indispensable bijou de délicatesse et de naïveté, voire même, qui sait, d'une introduction en douceur au djent.

A écouter : Utopia, Survival, Dystopia