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Biographie

Sepultura

Sepultura est créé en 1984 à Belo Horizonte, au Brésil par les frères Cavalera, Max et Igor âgés de quinze et quatorze ans. Passionnés par la musique, mais aussi très marqués par le brutal décès de leur père, les frangins ne tardent pas à stopper leur scolarité pour s’investir à fond dans ce projet et ce malgré leur jeune âge. 
L’une des toutes premières formations se compose de : Wagner Lamounier au chant, du bassiste Paulo Jr. (un ami d’enfance), de Max Cavalera à la guitare et Igor Cavalera à la batterie. Wagner Lamounier quitte rapidement Sepultura pour former Sarcofago. Après son départ, Max décide d'assurer le chant malgré et se fait remplacer par Jairo Guedes à la guitare. En 1985, Sepultura participe à quelques festivals locaux et se fait remarquer par un disquaire de la ville, lequel offre aux membres de quoi effectuer une session d'enregistrement de huit titres en studio. Peu après, le groupe rejoint le label créé par ce studio : Cogumelo Records. Ce dernier, faisant figure d'avant-garde dans la production de Heavy Metal au Brésil et produit les deux premiers disques de Sepultura. Leur premier EP, Bestial Devastation, est enregistré en deux jours dans un modeste studio. Dans son premier pressage, Bestial Devastation sort sur un split album dont la seconde face est réservée à un autre groupe brésilien, Overdose. Malgré un son médiocre, en raison de la saturation excessive des amplis, le disque permet au groupe de se faire connaître au Brésil et d'enregistrer Morbid Visions en 1986. Leur renommée se limite alors à leur pays d'origine mais leur prestation en première partie de Venom lors d'un concert à Belo Horizonte contribue à les faire remarquer. Les membres de Sepultura décident alors de déménager à São Paulo afin de bénéficier de meilleures conditions de travail. Sepultura est l’un des premiers groupe brésilien à se lancer dans l’aventure du Metal Extreme en compagnie de Sarcofago, les deux formations ont longtemps entretenu une rivalité. Jairo Guedez quitte le groupe à l'issue de la première tournée, en 1987. Il est remplacé par Andreas Kisser, celui-ci plus expérimenté apporte son savoir-faire et contribue grandement à l'évolution du style du groupe dans son nouvel album, Schizophrenia, le premier à être enregistré dans des conditions professionnelles. Durant quelques mois, le groupe effectue des concerts réunissant au minimum 2 000 personnes et écoule 10 000 copies de l'album, plus que ceux de grands groupes étrangers tels que Slayer ou Anthrax, Sepultura devient le leader de la scène Extreme brésilienne. En 1988, Max Cavalera après s'être fait quelques contacts durant des concerts décide d'aller aux États-Unis rencontrer des producteurs. Sepultura attire alors l'attention de Roadrunner Records, l'un des plus importants labels de Metal au monde (à cette époque) et grand importateur de groupes étrangers. Monte Conner, le directeur artistique les rencontre et décide de leur proposer un contrat à long terme afin de commercialiser Schizophrenia à plus grande échelle et ce, avant même d'avoir vu le groupe jouer. L'album Beneath the Remains est enregistré en neuf nuits (afin de bénéficier de tarifs plus avantageux) à Rio de Janeiro et les membres de Sepultura, ne maîtrisant pas l'anglais, doivent communiquer avec leur nouveau producteur Scott Burns (producteur de renommé mondiale ayant bossé avec Cannibal Corpse et d’autres groupes cultes) par traducteur interposé. Il annonce cependant le début du véritable succès de Sepultura hors du Brésil en lui permettant d'effectuer sa première tournée mondiale, essentiellement en Europe et en Amérique du Nord. Durant leurs dates en Europe, Sepultura est fréquemment réclamé par le public au point de raccourcir le concert du groupe précédent. En 1990 le groupe s’installe à Phoenix au États-Unis et embauchent une nouvelle équipe de management. En janvier 1991, s'achève la tournée de l'album Beneath the Remains par un concert au festival Rock in Rio, devant plus de 100 000 personnes. Ces participations à de grands festivals donnent l'occasion au groupe de se produire aux côtés des artistes qui l'ont inspiré, comme Metallica ou Kreator. Dans le courant de l'année 1990, ils enregistrent leur nouvel album, Arise, dans les studios Morrisound à Tampa en Floride. Sorti en avril 1991, le disque fait de Sepultura un des groupes de Death / Thrash Metal alors parmi les plus chroniqués dans la presse spécialisée. La chanson éponyme et un autre single, Dead Embryonic Cells. Les membres du groupe embauchent Gloria Bujnowski comme manager et s’installent définitivement dans l’Arizona. Arise permet au groupe d'asseoir sa renommée et d'effectuer une tournée mondiale de plus de deux ans durant laquelle il joue à deux reprises dans un stade à guichets fermés en Indonésie, et effectue la première partie de Megadeth et Guns N' Roses au festival Rock in Rio. Cette réussite internationale sert de modèle à de nombreux groupes provenant de pays où la scène Metal n'a que peu de visibilité médiatique. En 1992, le succès d'Arise conduit le groupe à jouer en première partie lors de deux grandes tournées : celle de Helmet et Ministry, ainsi que celle d'Alice In Chains et Ozzy Osbourne. Durant cette période, Max Cavalera épouse la manager de Sepultura, Gloria Bujnowski, presque de deux fois son aînée. En 1993 sort Chaos A.D,le cinquième album de Sepultura, dont les textes sont plus sociaux et dénonciateurs, notamment concernant le Brésil. Ce disque engagé atteint la 32e place du Billboard 200, fait rare pour un album de Metal. En 1996 c’est l'apogée de la popularité avec l’album Roots qui s'écoule à plus d'1 200 000 exemplaires. En partie enregistré lors d'une visite dans une réserve d'Indiens Xavantes, dans le Mato Grosso, l'album marque l'une des premières collaborations du groupe avec un autre artiste : le percussionniste Carlinhos Brown réalise des performances sur plusieurs titres. Le groupe enchaîne alors les participations aux plus grands festivals du monde, comme le Pinkpop aux Pays-Bas. En outre, Sepultura interprète Roots Bloody Roots et Ratamahatta dans l'émission de Canal + Nulle part ailleurs, et joue au Zénith de Paris. 

En 1996, Sepultura donne à nouveau un concert au festival Monsters of Rock de Castle Donington, en Angleterre aux côtés d'Ozzy Osbourne, Paradise Lost ou encore Fear Factory. Ayant appris quelques heures auparavant la mort de son beau-fils, Dana Wells, dans un accident de voiture, Max Cavalera prend le premier vol pour les États-Unis, contraignant le guitariste Andreas Kisser à assurer les parties vocales lors du concert. La mère du défunt n'est autre que Gloria Bujnowski, épouse de Max Cavalera depuis 1992 et manager du groupe. Brisés par ce décès, des tensions apparaissent durant la tournée de l'album Roots. Suite à ces événements Kisser et Paulo Jr, ne souhaitent pas renouveler le contrat de Gloria Bujnowski et tentent de convaincre les deux frères Cavalera de changer de management. Le 16 décembre 1996, après un concert à la Brixton Academy de Londres, le chanteur, s'estimant trahi et officialise son départ début 1997. Max Cavalera crée quelques mois plus tard Soulfly, son nouveau groupe. C’est sans aucun doute le tournant décisif de la carrière de Sepultura

Après le départ de Max Cavalera le public craint une séparation définitive du groupe mais tous les membres émettent communément la volonté de continuer à jouer ensemble. Après de longues recherches le groupe choisit Derrick Green comme nouveau chanteur, originaire de Cleveland dans l'Ohio, et venu de la scène Hardcore. Toutefois, Against, premier opus avec Derrick Green au chant, est plutôt mal accueilli par les fans et les critiques notamment en raison de la différence vocale avec Max Cavalera. Cet album obtient donc un succès commercial bien plus faible que ses deux prédécesseurs, et se vend à deux fois moins d'exemplaires que le premier album de Soulfly. Le huitième album studio du groupe, Nation, sort en 2001 dans lequel figure une collaboration avec le groupe de violoncellistes Apocalyptica, En 2003 est produit Revolusongs, un album EP qui témoigne de l'éclectisme du groupe : il est en effet composé de huit reprises de groupes aussi divers que Massive Attack, U2, Hellhammer ou encore le groupe de hip-hop Public Enemy. La même année, et contre la volonté du groupe, Roadrunner Records commercialise le dernier live de Sepultura avec Max Cavalera, enregistré en 1996 à la Brixton Academy de Londres et intitulé Under a Pale Grey Sky. Sorti en 2003, Roorback est le neuvième album studio et le premier produit par SPV Records. Malgré une critique plutôt favorable, les ventes demeurent faibles. Sepultura joue en 2005 au Dubai Desert Rock Festival, et sort un DVD live en novembre de la même année, intitulé Live In São Paulo. Le groupe veille particulièrement à donner des concerts dans des pays où la scène Metal est peu développée comme en Nouvelle-Zélande ou en Indonésie. Le dixième album studio est un album-concept inspiré de la Divine Comédie et intitulé Dante XXI, il sort le 14 mars 2006. Deux clips vidéo sont enregistrés : Convicted in Life et Ostia. Le 26 janvier 2009, le groupe sort son onzième album studio, intitulé A-Lex. Nouvel album-concept, inspiré du roman d'Anthony Burgess L'Orange mécanique, il est le premier à être réalisé sans la collaboration d'au moins un des deux frères Cavalera. L'enregistrement s'est déroulé fin 2008 aux studios Trama à São Paulo. Le groupe joue quelques chansons de ce nouvel album en première partie de deux concerts de Metallica au Stade Cícero Pompeu de Toledo à São Paulo, le 20 et le 21 janvier 2010, devant 100 000 personnes au total. Par ailleurs, le 20 juin 2010, Sepultura devient le premier groupe de Metal professionnel à donner un concert sur l'île de la Réunion. Le 6 juillet 2011, Sepultura annonce avoir signé un contrat avec le label de Metal allemand Nuclear Blast, prévoyant la sortie d'un album en 2011. Fin 2010, les membres produisent de nouvelles chansons et entrent en studio au Brésil pour enregistrer l'album, sous la direction du producteur Roy Z, ayant collaboré avec Judas Priest et Bruce Dickinson du groupe Iron Maiden. Le 1er mars s'achève la réalisation de l'album, nommé Kairos, qui sort en juin 2011. L'album comprend des reprises de Ministry (One More Fix) et de The Prodigy (Firestarter), chacune disponible dans une édition bonus. Sepultura a effectué une tournée mondiale, intitulée Kairos World Tour, durant laquelle le groupe a joué au Wacken Open Air, à la Foire aux Vins de Colmar ou au festival Rock in Rio, en compagnie des Tambours du Bronx. La tournée sud-américaine s'est faite avec Machine Head. 

De la formation originale ne reste aujourd'hui que le bassiste Paulo Jr qui a joué dans tous les albums. Le dernier membre arrivé dans la formation actuelle du groupe est le batteur Eloy Casagrande, jeune prodige âgé de seulement vingt ans. Le treizième album du groupe, intitulé The Mediator Between Head and Hands Must Be the Heart, est sorti le 25 octobre 2013 en Europe et le 29 octobre aux États-Unis. Lancé sur un rythme de croisière, Sepultura enchaîne en 2017 avec Machine Messiah, et on attendra seulement trois ans avant de voir débarquer Quadra, quinzième long format des Brésiliens.

16.5 / 20
22 commentaires (16.84/20).
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Quadra ( 2020 )

Déjà en 2013, alors que Sepultura se munissait d’un nouveau batteur-monstre en la personne d’Eloy Casagrande, The Mediator Between Head and Hands Must Be the Heart, treizième album des Brésiliens, nous ravissait. Impressionnés que nous étions par ce retour en grâce d’un groupe qui se cherchait un peu depuis le départ des frangins Cavalera. Néanmoins Andreas Kisser et Paulo Jr ont suffisamment maintenu la barque à flot pour qu’elle ne coule pas et puisse ressurgir à nouveau en implacable vaisseau. Et Machine Messiah est venu confirmer notre enthousiasme en 2017, rendant une copie quasi parfaite, honorant aussi bien les origines Thrash/Death de Sepultura que ses intentions modernes aux frontières du Heavy et du Hardcore. On soulignera au passage les énormes progrès de Derrick Green au chant, qui dépasse aujourd’hui largement ce bon vieux Max, et pas seulement d'un point de vue technique. Quadra vient donc à point nommé pour valider ce constat : la résurrection est désormais complète et même susceptible de détrôner les « intouchables » classiques du quartet de Belo Horizonte.

Ainsi Isolation puis Last Time nous prennent directement par les sentiments avec un petit voyage dans le temps, du coté des Beneath the Remains et Arise voire Chaos A.D., agrémentés de passages progressifs et de chœurs que l’on retrouvera éparpillés sur l’ensemble des titres. Tout comme les percussions et rythmiques brésiliennes, que l’on savourera sur un Capital Enslavement hardcorisé, également serti de boucles de violoncelles, assez récurrentes depuis The Mediator…. Et ça déroule via une écriture fluide, sans concessions, avec les contretemps gracieux et les voix scandées d’un Raging Void, ou la puissance d’une six cordes qui ne faiblit jamais, que l’on parle des soli idéalement ajustés d’un Kisser chaud bouillant ou de son rendement riffique démentiel.

Parmi les sommets de l’album – bien qu’on puisse considérer que l’objet entier est une montagne – on citera le formidable instrumental The Pentagram, où la machine organique Casagrande nous éclate proprement la gueule par ses changements de rythme et sa vitesse d’exécution ; Means to an End, son déluge de frappes, son groove frissonnant, proche d’un Roots ; l’épique Guardians of Earth où les chœurs prennent toute leur place, comme sur Agony of Defeat, augmentés d’un Green qui prend un certain plaisir à étaler ses capacités vocales sur nos visages fébriles. Seule petite ombre au tableau, Fear, Pain, Chaos, Suffering et ses étranges atours « hard FM », malgré une maestria technique incontestable.

Après un Machine Messiah qui ne laissait plus aucune marge de manœuvre au doute, Quadra s’inscrit dans une même logique de renouvellement et de solidification des acquis. Kisser, Paulo Jr, Green et Casagrande savent parfaitement où ils vont et continuent de redonner une seconde jeunesse à Sepultura, à tel point qu’on se surprend à hurler avec Derrick, comme on le faisait avec Max. Laissons croupir au fond des ténèbres les éternels grincheux nostalgiques des Cavalera, et délectons-nous d’un temps présent audacieux, les cervicales souples, le poing levé.

A écouter : heavydemment.
16 / 20
38 commentaires (16.78/20).

Machine Messiah ( 2017 )

Il y a trois ans, Sepultura étonnait son monde en balançant un album que beaucoup n'attendait plus. The Mediator Between Head And Hands Must Be The Heart étonnait par sa force et sa structure impeccable et on se disait alors que les Brésiliens avaient enfin retrouvé l'inspiration qui leur fait défaut depuis si longtemps. Machine Messiah, le dernier arrivé, pourrait bien définitivement sceller le retour aux affaires sérieuses pour Sepultura, et franchement, on ne s'en plaindrait pas. 

Les nostalgiques vous diront que Sepultura est mort quand Max Cavalera a quitté le navire en pleine gloire en 1997. Ce qui est sûr, c'est que depuis le succès commercial n'est plus le même et l'impact musical sur la scène non plus. Si vingt ans après certains y pensent encore, la bande à Kisser semble elle, être passée à autre chose. Difficile de ne pas introduire Machine Messiah en ayant quelques mots pour The Mediator Between Head And Hands Must Be The Heart puisque ce dernier a réellement relancé Sepultura en 2013. On a pu constater un groupe de nouveau puissant, structuré et surtout inspiré qui livra son meilleur album depuis des lustres. Machine Messiah en est la suite logique, à la différence près que les Brésiliens sont allés encore plus loin dans l'ambition et n'ont pas hésité à prendre des risques. Il suffit d'une seule écoute pour comprendre que cet opus est riche, et joue la carte du contre-pied en quasi permanence avec des rythmiques oscillant entre Thrash et Groove Metal aux légers accents tribaux, mais pas seulement. Sepultura se paye le luxe d'introduire des sections à cordes dans ses compositions (Phantom Self et Sworn Oath notamment) avec un résultat plus que probant, toujours bien placées, elles apportent une touche presque progressive et épique à la musique d'un groupe en pleine démonstration. Changements de rythmes, soli, brutalité, finesse, lourdeur, tout y passe ou presque. L'un des grand artisan de ce brulot est évidemment Andreas Kisser qui éclabousse Machine Messiah de tout son savoir-faire avec des parties guitares jouées au millimètre, le gaillard sait quand il faut accélérer ou ralentir, on a clairement l'impression qu'il est le grand maître de cérémonie et que ses compères le suivent aveuglement. On découvre aussi (enfin ?) un Derrick Green qui exploite toutes ses capacités vocales en passant d'un registre puissant (I Am The Enemy, Alethea) à un registre terrifiant (Machine Messiah, Cyber God) sans le moindre problème en collant toujours à la musique. On pourrait également mettre en avant Eloy Casagrande dont la frappe et la technique sont en parfaite adéquation avec l'esprit de l'actuel Sepultura, celui qui ose et met en pratique ses idées avec brio. Paulo Junior quant à lui, fait comme il a toujours fait depuis le milieu des années 80 : il fait le job, ni plus ni moins, mais il le fait bien. 

Vous l'avez compris, Machine Messiah est plus qu'un nouvel album de Sepultura, il est cet album qui prouve définitivement au grand public, et peut-être à eux-même, que la page Cavalera est tournée. C'est un bien puisque cela leur permet d'enfin s'épanouir pleinement et par la même occasion de nous faire plaisir.

A écouter : C'est vivement conseillé
10 / 20
20 commentaires (15.38/20).
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Kairos ( 2011 )

Depuis Morbid Visions (1986), de l'eau a coulé sous les ponts et on est à même de se demander ce qu'est devenu Sepultura. Comment ont-ils endossé le fardeau de leur propre existence ? Qu'en est-il de l'identité du groupe ?
Kairos (album sorti en 2011 chez Nuclear Blast) est aussi un concept riche en significations qui pourrait se traduire par « moment opportun » et qui exprime notre rapport au temps d'un point de vue existentiel. C'est donc ce point de bascule, cet instant décisif qui, s' il est saisi, donne tout son sens au choix libre et consenti.
Produit par Roy Z (guitariste et notamment producteur des projets solo de Bruce Dickinson et Rob Halford), Kairos est une manière pour Sepultura d'interroger ses propres racines. Faisons le point.

Au bout de 25 ans d'existence, il est délicat d'évaluer un album sans se rapporter aux précédentes créations du groupe et à son âge d'or (période Cavalera). Il ne s'agit pas d’être ou non partisan du « c'était mieux avant » mais de rendre compte de son évolution et de sa cohérence. Or, ce nouvel opus ne nous permet pas d'identifier clairement la direction musicale que prend Sepultura.
En effet, il ressort de ces 45 minutes une certaine tiédeur tant le manque d'inspiration se fait ressentir. La plupart des titres se suivent sans vraiment se démarquer, nous plongeant dans une apathie grandissante. Tout porte à croire que les Brésiliens ont opté pour un pilotage automatique et qu'ils se laissent porter par leur savoir-faire. Même si un soupçon d'originalité se dégage de morceaux comme Spectrum (peut-être le titre le plus innovant) ou Born Strong, les fulgurances se font trop rares et sont noyées par des répétitions. Les solos de guitares sont casés et très vite oubliés, la rythmique est assez lourde voire pataude, les intermèdes (2011, 1433, 5772) font office de remplissage.
Bref, on est en présence d'un spectre musical relativement miteux. Sepultura nous propose quelque chose de très convenu qui laisse peu de place à la surprise et aux rebondissements.

Même après plusieurs écoutes, on ne parvient pas à saisir la singularité de Kairos étant donné que le groupe semble nager entre deux eaux et donne l'impression de se chercher toujours. Il y a bien une volonté de proposer quelque chose de neuf mais ce n'est pas assez marqué.
L'identité du groupe se dissout dans un passé plus ou moins assimilé, ce qui crée une orientation musicale instable et pas pleinement assumée ; on oscille entre les débuts Thrash Metal de Sepultura et un Metal/Hardcore sans conviction. Cela donne un album en demi-teinte qui peut s'écouter de manière passive, en fond sonore, sans marquer les esprits.

A écouter : Spectrum, Born Strong, Dialog
14.5 / 20
42 commentaires (16.37/20).

Dante XXI ( 2006 )

Voilà 3 ans que Sepultura ont sorti leur dernier album, après un retour un poil plus violent avec un Roorback qui paraissait légèrement brouillon, beaucoup de fans de Sepultura n'attendent plus grand chose de la part du groupe: un Against en demi-teinte, un Nation assez ininterressant, et un Roorback avec lequel on a plutôt l'imptression qu'ils voulaient retrouver quelques admirateurs perdus depuis l'ère Cavalera...

Pour commencer, inutile de comparer une énième fois le Sepultura du temps de Max Cavalera au Sepultura d'aujourd'hui. Ce sont bel et bien deux groupes aux compositions differentes, pas la peine donc de s'attarder à des banalités du genre "c'est moins bon qu'Arise"...
Premier élement qu'on ne peut ignorer à l'approche de ce disque tant il saute indéniablement aux yeux: la pochette. Assez originale de par son graphisme et ses couleurs en adéquation avec le concept du cd, elle se démarque clairement des pochettes actuelles et ne se révèle n'être pas si moche qu'on a pu l'entendre dire. L'album est divisé en trois parties: l’Enfer, le Purgatoire et le Paradis d'après La divine Comédie de Dante Aleghieri (des instrumentales scindent le disque en trois parties).
Deuxième élement ô combien important: le son. Il est la plupart du temps déçevant sur les dernières réalisations du groupe, par son son de guitare essentiellement, bien trop néo pour du Sepultura... Et bien ça ne faillit pas à la règle, le son de guitare est dans la lignée des derniers albums, et le son de batterie fait vraiment pâle pour un jeu de la trempe d'Igor Cavalera. Les toms sur l'intro de Convicted In Life en sont la preuve, cela donne même un effet de batterie en retrait sur certains passages de l'album. On aurait préféré un son plus lourd à la Dave Mc Clain (Machine Head) peut-être...

Cela fait-il de Dante XXI un album dans la lignée des précedents? assurément non. Car les compositions sont bien plus inspirées que sur Against ou Nation. Même si le premier titre Darl Wood Of Error fait indéniablement penser au I de Meshuggah, le groupe enchaine ensuite un Convicted In Life bien énergique, un début d'album assez violent donc. Par la suite, les compos ne perdront pas en energie, ni en riff Kisserien (Fighting on, Burried words).
Mais ce qui différencie ce Dante XXI des trois précedents albums et l'effort d'incrustation de violons, violoncelles et autres cuivres peu commun au groupe. Le résultat sur Ostia est vraiment réussi, et les courts titres instrumentaux qui viennent parsemer ce disque (intro 1, 2, 3, still flame) donnent une veritable identité à l'ensemble, et ne viennent pas juste remplir la place disponible sur le cd comme on a eu souvent l'impression avec Sepultura ces dernières années... A noter de nets progrès au chant également pour Derrick Green qui s'impose beaucoup plus sur ce disque.

Bon ce n'est pas l'album de l'année non plus c'est certain mais il n'est pas non plus mauvais, Sepultura remonte la pente en réalisant cette fois ci un album cohérent, ce qui a fait défaut au groupe ces dérnières années. De plus, l'effort artistique et musical se révèle assez interressant (le dernier titre clotûre bien le concept de ce cd).
Le bon point pour l'ensemble du disque qui se laisse bien écouter, mais un mauvais pour le son qui aurait vraiment gagné à être plus puissant.

Des morceaux en écoute sur myspace.

A écouter : Convicted In Life, Ostia
16.5 / 20
27 commentaires (17.69/20).
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Under A Pale Grey Sky ( 2002 )

16 décembre 1996, Londres, la formation (quasi) initiale de Sepultura donne son dernier concert. Presque 6 ans plus tard, tout les malchanceux qui n'étaient pas en Angleterre ce soir là peuvent enfin se rattraper, grâce à ce double album (ironiquement) intitulé Under a pale grey sky qui restitue la prestation dans son intégralité, rappels compris.
Ce live constitue en fait le meilleur des best of possible, car Sepultura n'a jamais était aussi efficace qu'en concert. Ici, pas de fioritures, tout les membres du groupe se donnent à fond, Max (Cavalera) hurle comme un possédé sans jamais prendre de pause (quand respire t-il ???), Andreas Kisser, à moitié caché sous son abondante chevelure, envoi de sérieux coups de médiator, Paulo Jr maltraite sa basse et Igor Cavalera martèle les fûts comme si sa vie en dépendait. Rarement un groupe aura été aussi compact et intense, rarement quatre personnes auront fait tant de bruit et hypnotisé un public comme cela.
Best of aussi de part les morceaux choisis, car s'il s'agit bien ici de la tournée Roots, tous les albums du groupe sont représentés. Certes les immenses Roots et Chaos A.D. se taille la part du lion, à raison. Roots bloody roots annonce la couleur en ouverture, puis les titres s'enchaînent Territory, Attitude , We who are not as others , un superbe Kaiowas qui embrase la foule, un Ratamahatta d'anthologie et même un Refuse/resist légèrement remanié. Les vieux titres, plus death, n'ont pas pris une ride et on retrouvera avec joie Troops of doom , Necromencer et autre Arise . Orgasmatron , emprunté à Mötorhead pour l'occasion, viendra clore la soirée en beauté sous un déluge de saturation.
Du bon, du bon et encore du bon, quelque soit le titre joué le groupe y met tout son cœur pour le plus grand plaisir des fans rassemblé se soir là, et pour le notre aujourd'hui. Que vous connaissiez déjà Sepultura ou non, ce disque est tout simplement indispensable.

A écouter : Attitude - Refuse/resist - Kaiowas
18 / 20
77 commentaires (18.19/20).
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Chaos A.D. ( 1993 )

  Sepultura a toujours mis un point d'honneur, depuis le début de sa carrière, à établir un lien logique entre ses albums. L'un amène le suivant avec une incroyable pertinence, tout en apportant son lot de nouveautés. Mais ce "Chaos A.D" marque néanmoins un tournant important dans la carrière des brésiliens, véritable coup de tonnerre dans un milieu métal alors en perte de vitesse et de perspectives.

  Disons les choses telles qu'elles sont, les douze brûlots réunis sur ce disque sont autant de cocktails Molotov prêts à heurter les tympans de l'auditeur masochiste. Une recette simple pour un résultat efficace et ravageur. Cette nouvelle impulsion dans leur répertoire provient essentiellement de la redécouverte par Max Cavalera des grands noms du punk hardcore que sont Discharge, ou encore Jello Biafra et ses Dead Kennedys. La dilution de ces influences dans les compositions du combo va s'opérer au détriment des ambiances death des précédentes productions, pour favoriser désormais l'alternance de virulents rythmes hardcore et d'époustouflants passages heavy. Au-delà des nombreux titres taillés pour le headbang, Sepultura accouche de véritables hymnes transcendés respectivement par le chant vindicatif et l'impressionnant jeu de batterie des frères Cavalera ("Refuse/Resist", "Territory", "Slave New World").  Les riffs acérés d'Andreas Kisser ne sont toutefois pas en reste, alternant avec maestria stridence, pilonnage, et soli épileptiques (le dévastateur  "Propaganda"). Les natifs de Belo Horizonte quittent donc peu à peu le thrash pour un métal qui servira de modèle à de nombreux groupes par la suite. Ils vont par ailleurs explorer de nouvelles sonorités au sein des morceaux, qu'elles soient hypnotiques ("Amen"), ou entêtantes ("We Who Are Not As The Others"). Dans cette même optique, Sepultura révèlera déjà tout  l'intérêt qu'il porte aux musiques tribales dans la plus grande tradition brésilienne (le brillant et dépouillé "Kaiowas"). Mais le groupe sait d'où il vient, et c'est à ce titre que "Biotech Is Godzilla" renoue avec la rapidité thrash, sans pour autant trahir l'esprit novateur du disque. Les fans de la première heure ne seront ainsi pas déstabilisés.

  Mais ce qui vient véritablement cimenter la simple succession de titres brillants, c'est cette spontanéité et cette révolte constante qui émane de "Chaos A.D". Après avoir abordé les schémas post-apocalyptiques durant la période thrash/death du groupe, Max Cavalera s'intéresse désormais à son époque, exprimant son dégoût (sans être démago) envers le pouvoir oppresseur et la violence, tant physique que sociale, à laquelle il conduit. Rien ne semble échapper au charismatique chanteur/guitariste, que ce soit le conflit israélo-palestinien, la société de consommation, la désinformation, les conditions de détention dans les prisons brésiliennes, la toute-puissance des grands laboratoires génétiques, ou encore l'éradication progressive de la culture nomade/tribale. Il s'avère difficile de rester de marbre face à une telle conviction et une telle énergie déployée. Sepultura nous plonge inéluctablement au cœur du conflit, sans pour autant mettre l'auditeur mal à l'aise. Au contraire, c'est le poing levé et la démarche sûre que l'on rejoint les rangs, comme absorbés par cette imparable et rassurante puissance.

  "Chaos A.D" est donc un album maîtrisé sur toute la ligne, aussi bien sur la substance que l’ambiance guerrière qui s’en dégage. Il propulsera de facto les brésiliens parmi les ténors du métal,  et constitue une étape cruciale dans leur discographie. Sepultura peut ainsi poursuivre sa quête de modernité, qui s’accompagne paradoxalement d’un retour à ses origines, "ses racines".

A écouter : Absolument