Biographie

Pitchshifter

Apparaissant au début des années 90, Pitchshifter est surement le groupe industriel le plus discret de la scène international. Il faut dire que leurs débuts s’apparentaient plus à un indus métal maladroit, de facture sous Ministry, qu’à des sonorités personnelles et captivantes. Pourtant, le groupe se développe dans l’ombre et sors quelques albums : Industrial en 91, Submit en 92, Desensitized en 93 et Infotainment en 96. Le groupe milite pour une musique libre et fournit à la fin de leurs albums (et ce à partir d’Infotainment) l’ensemble des samples utilisés pour l’usage de n’importe quel autre musicien désireux de créer.
Mais il faudra malgré tout attendre 1998 pour que Pichshifter perfore enfin la cage dans laquelle ils évoluaient. Le groupe se détache de ses racines étouffantes et repart sur une voie radicalement différente. Plus énergique, plus rock et d’une fraîcheur stupéfiante, www.pitchshifter.com constitue la première expiration du second souffle de la formation. Second souffle qui, hélas, ne sera pas entretenu bien longtemps… L’album suivant, Deviant, sans être mauvais se révèlera bien facile et décevant et ce n’est pas un médiocre PSI aux relents néo simplistes, sorti en 2002, qui aidera à avaler la pilule. Tout n’est pas à jeter, mais Pichshifter semble avoir encore bifurquer pour se réenfermer dans une autre cage, cette fois trop accessible. Un album live sort en 2005 et le groupe disparaît dans l’ombre, des rumeurs récurrentes de split entamant peu à peu l’espoir d’un nouvel opus à la hauteur de www.pitchshifter.com

Chronique

17 / 20
6 commentaires (15.5/20).
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www.pitchshifter.com ( 1998 )

Album inconnu pour une majeure partie de la population auditive, www.pitchshifter.com est pourtant pour les adeptes un album aux frontières du culte. Si il fallait lui trouver un lien de parenté, les regards se porteraient instantanément vers un autre monument : The Fat Of The Land de Prodigy. Du chant à la dépendance aggravée à la drum’n’bass, les points communs sont légions. Les amoureux d’un Fuel My Fire devraient arrêter ici leur lecture pour se ruer sur Pitchshifter, pour les autres, une étude addictive plus approfondie est proposée, nous n’assurons ni le suivi, ni la désintoxication.

Difficile, à l’écoute des précédents albums du groupes, de concevoir que www.pitchshifter.com est le rejeton de la même formation. Il serait odieux de s’en fâcher tant l’objet bouscule les codes du rock industriel. Rock… oui, car il est difficile de réellement parler de métal tant les mélodies et les refrains sont entêtants et accrocheurs. Le rendu est loin de posséder la violence crue et l’aspect sombre des opus précédents, il lorgnerait même vers des galaxies techno punk à peine explorées. Pour prendre réellement conscience du talent des 4 britanniques, une seule dose de Genius ou de Microwaved suffit la plupart du temps à embrigader les plus réticents. Le répétitif des agressions électriques, conjuguées à des lignes de basse répétitives, s’accordent à des rythmiques fiévreuses pour un impact mécaniquement organique. L’énergie et la puissance déployée est sûrement la substance qui arrive à porter le mélange vers le cérébral à une vitesse défiant celle du son. Nerveusement parlant, le diagnostic se révèle plus ou moins dramatique : selon la résistance psychique et physique de chacun, la part de mouvement incontrôlés (concernant essentiellement cou et tête) variera de moyenne à forte. Le constat inébranlable est que les sujets demeurant insensibles aux ondes auditives de Pitchshifter sont rares.

Mais la composition de chaque dose n’est pas identique, loin de là. L’agressivité est délaissée le temps de quelques instants sur des passages où les subtilités électroniques et vocales possèdent une place bien plus conséquente. Civilised ou What’s In It For Me ? s’inscrivent dans cette logique de tempo ralenti et de vigoureux changement d’intensité ramenant le niveau de saturation électrique à la normale. Le clou est encore enfoncé avec un Disposable aux apports accoustiques doucereusement trompeurs, nos neurones luttent avec d’autant plus de difficultés si ils sont anesthésiés au préalable. La diversité des mélanges coupe court à tout risque d’accoutumance et ce ne sont pas les épileptiques instrumentaux (Innit, ZX81) qui jonchent le traitement qui s’opposeront à cet éclectisme.

Bien que fort méconnu, www.pitchshifter.com est à mes yeux un disque majeur du milieu des années 90. L’ingéniosité et l’âme de ce disque transpire la fraîcheur et une efficacité rarement égalée. Maîtrisé de long en large, de la première à la dernière seconde, l’ennui demeure inconnu et la dépendance rarement évitable. L’esprit punk qui domine les textes se prolonge jusque dans les recoins de l’objet, que ce soit au niveau de l’artwork ou simplement des samples mis à disposition de tous et réutilisables librement. A consommer de toute urgence pour les individus demeurés sourds aux tremblements de leurs fondations…

A écouter : Int�gralement... Tout est bouillonant !