Le sud, terre de violence ? On en avait déjà bien conscience, les spationautes de Verdun ou les têtes d’ampoule d’Hypno5e nous le rappellent volontiers. Le label Montpelliérain Head Records est aussi un pourvoyeur efficace du Rock au Doom/Sludge/Hardcore, abritant les pépites méditerranéennes de Marvin, Stuntman, Goodbye Diana, Mombu, et consorts. C’est justement sa tête pensante Abel qui a donné vie au Morse ici présent, bestiau qui pèse son poids, trimbalant un Beliefs Destroyer pondu en 2013, tout congestionné, asphyxié par ses propres déjections. Ce qui alourdi la charge.
Morse accouche de Pathetic Mankind alors qu’il porte encore le cadavre décomposé de son précédent bébé, souffrant lui d’un traitement audio pas vraiment adapté aux intentions parentales. Hardcore pété à la Coalesce, Grindcore tendance Nails, étouffement Sludge permanent, sont toujours à l’œuvre, dans le but de faire mieux, en conservant bien sûr les bonnes idées. On aura donc le délicat plaisir de déguster la déflagration d’un rendu autrement plus cool, agrippant nos entrailles, corrompant nos sens. Un frappeur qui martèle jusqu’à l'os, une guitare salement obèse, instillant des mains mélodiques discrètement tendues à travers les sables carnassiers ne trouvant pas preneur, une basse plombante qui ne déplairait pas à Nate Newton (Converge), et un hurleur terriblement investi, de quoi manger pour dix. On n’omet pas le propos à peine effleuré par le nom de l’objet et on se retrouve nécessairement épris d’un profond sentiment de pitié envers l’humanité, empêtrée ras la tronche des conséquences de ses décisions (auto)destructrices, paralysée, ensevelie sous la cupidité et le pouvoir.
Une observation sans doute partagée par Cult Leader ou Calvaiire, s’inscrivant dans un sillon similaire. Corrupted Senses nous le fait comprendre alors qu’on est à peine en train de franchir le seuil, tout comme Lies and Greed, massant vigoureusement les cervicales pour mieux nous préparer à la suite. On réalise vite que rien ne sera en mesure d’entraver l’entreprise suicidaire, en plein Unstoppable Fire, instant où la gangrène Sludge se déclare, suivi d’une transition (Filthy…) au piano bouffé par la saturation, ouvrant un arc nauséeux, squatté par la dissonance et un morceau éponyme rongé de rouille, écrasé de lignes de basse sanguinolentes. Un piano plus dépressif referme le triptyque (...Bliss) juste après le point d’orgue The Praise Of The Empty, ne laissant aucune marge de manœuvre au moindre minuscule rayon d’optimisme. Sapped by Illness le confirme brutalement, la pandémie est irréversible, il n’existe aucun antidote.
Morse délivre ses plus sombres et tortueux desseins avec Pathetic Mankind. Une ode à la violence musicale qui aurait toutefois mérité un rapprochement moins évident avec d’autres formations du même tonneau, malgré un traitement assez inédit sur la guitare. Enfin l’humanité bien avisée acceptera la correction sans sourciller, d’autant plus avec un rendu pareil (merci Amaury Sauvé et Serge Morattel).
A écouter : délicatement.