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Biographie

Kampfar

Né des cendres de Mock, Kampfar est le projet d’un homme : Dolk. Initié en 1994, le groupe qui est un duo Dolk s'occupe du chant et de la batterie et Thomas de la basse et de la guitare sort rapidement une démo qui convainc Season Of Mist de les signer pour un ep éponyme en 1996. C'est en 1997 que la véritable œuvre du duo voit le jour chez Malicious Records. Mellom Skogkledde Aaser offre l’un des premiers véritables disques de Pagan Black Metal norvégien et devient dès lors culte pour beaucoup. L’année suivante, ils quittent une nouvelle fois le label qui l’accueille pour rejoindre les rangs de Hammerheart Records pour la parution d’un ep intitulé Norse et de leur deuxième album, Fra Underverdenen. Pas vraiment doué pour les relations avec les labels, Dolk quitte une nouvelle fois en 1999 la maison qui l’accueille et s’en suivent de nombreuses et obscures joutes entre le norvégiens et ses trois labels successifs pour de sombres histoires de droits d’auteur.

C’est finalement en 2003 que les histoires s’éclaircissent et que Kampfar peut enfin reprendre ses activités avec un line-up stable. Dolk s'occupe désormais que du chant, Thomas de la guitare, et ils recrutent Ask à la batterie et Jon Bakker à la basse. En 2006 voit le jour Kvass, troisième album du combo, qui renoue avec les racines norvégiennes et sort chez Napalm Records, puis dans la foulée Heimgang en 2008. Cependant en 2010, Thomas, qui était à l'origine de Kampfar et du duo de départ, quitte le projet et c'est en trio que Kampfar sort donc Mare en 2011, Jon s'étant occupé de la guitare.

Ole Hartvigsen est recruté à la guitare et aux claviers en 2011. Le groupe laisse passer un peu de temps avant de revenir plus fort et signer chez Indie Recordings qui édite coup sur coup Djevelmakt en 2014 et Profan en 2015. Ofidians Manifest, le dernier effort de Kampfar est paru en 2019.

13.5 / 20
4 commentaires (17.5/20).
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Kvass ( 2006 )

Kampfar fait partie de ces groupes de Black Metal considérés comme cultes, mais dont la renommée reste somme toutes très limitée, surtout dans des contrées éloignées de la Norvège. Tapis dans l’ombre, les admirateurs de la discrète personnalité qu’est Dolk espéraient pourtant secrètement que l’entité norvégienne renaisse de ses cendres, et il ne tenait qu’à lui de reconstituer un line-up solide et de sortir un nouvel album. Napalm Records, label autrichien, a offert sa chance au groupe et on les comprend tant le groupe bénéficie toujours de l’aura qu’il a su se créer à une époque presque lointaine. Kvass est le nouvel opus d’un groupe regretté mais dont peu espéraient encore quelque chose, tant les groupes de Black Metal vont et viennent, mais aussi à cause des déboires du norvégien.

Pas de doute possible pourtant, Kvass est bien l’œuvre de Kampfar. Il offre un Black Metal pur et classieux, dans l’immaculée tradition norvégienne Pagan, dont le groupe est d’ailleurs l’un des précurseurs, tant au niveau de l’ambiance que du son. Sans tomber dans de ridicules clichés, la musique des norvégiens semble pourtant tout droit jouée du haut de cimes enneigées, où le froid et le blizzard ont repoussé toute présence humaine durant les longs mois de l’hiver. Là pourtant, Dolk et ses sbires, torses nus, les cheveux au vent, sous le traître soleil, crient leur amour de la nature et des traditions ancestrales. Leurs complaintes sont faites de mélodies belles et glaciales, sorties par des guitares entremêlées entre arpèges et accords massifs et ambiants. Le chant du mentor se fait abrasif, éraillé comme jamais, nous délectant pourtant distinctement de chaque syllabe de ses textes norvégiens et offrant même un semblant de mélodie à ses hurlements infernaux.

Pourtant, Kvass n’est pas l’un de ces disques de Black Metal à la brutalité et à la haine abjectes, la musique qu’il contient est déversée presque avec calme et volupté. La batterie soutient l’ensemble de manière lancinante, malgré quelques passades plus virulentes, mais l’ensemble laisse indéniablement une impression de sérénité (Til Siste Mann). Kampfar crée son univers, développe ses lamentations esthétiques et uniques sur ses longs titres et on se laisse prendre au fil d’un album qui fait retrouver (ou découvrir, c’est selon) une atmosphère propre au groupe. A l’instar d’un Windir ou d’un Drudkh, la musique orchestrée par Dolk est le fruit d’une alchimie connue de lui seul, aux frontières de voyages épiques, de mélancolie et d’esthétisme, qui donne un résultat unique et reconnaissable entre tous parmi l’incroyable quantité de groupes de Black Metal norvégiens encore vivants.

Le seul reproche que l’on pourra faire à ce Kvass, encore qu’il soit totalement subjectif selon la manière dont on aborde cette scène, c’est d’être "un album de plus". Kampfar renaît des enfers, mais Kampfar n’apporte rien. Sa nouvelle offrande sonne fatalement très old school et l’on peut s’en lasser, tant le genre a été exploré au cours des années. Et cela parait contradictoire puisqu'on l'a mentionné, le groupe sonne comme nul autre, possède son univers unique. Seulement voilà, des tas d’autres formations sont passées par là depuis toutes ces années, copiant ou non, mais approchant fortement la recette, et elle n’a certainement plus la même saveur. Kvass peut même se révéler lassant, malgré sa richesse, mais son concept même y conduit.

En définitive, Kvass plaira en particulier à ceux qui regrettaient le groupe. Les aficionados de l’underground grouillant et de l’esprit norvégiens dégusteront avec plaisir ce nouveau disque de Kampfar qui révèlera son âme pourtant trop vue après quelques écoutes. Dans le cas contraire, pour les simples "amateurs" de Black Metal, il sera difficile de ne pas voir en Kvass autre chose qu'une sortie parmi d’autres, pas dégueulasse mais pas exceptionnelle, sur lequel on passera malheureusement bien vite.

Mellom Skogkledde Aaser ( 1997 )

Nous sommes en 1997 et Kampfar est alors un jeune duo norvégien de Black Metal qui sort son premier album sur un petit label allemand, Malicious Records. Il se passe pas mal de choses à l’époque notamment en Norvège. Summoning sort Dol Guldur, Immortal arrive avec Blizzard Beasts, Ulver livre Nattens Madrigal, Dimmu Borgir c’est Enthroned Darkness Triumphant et Emperor est aussi là avec Anthems At The Welkin At Dusk. En bref, si le Black Metal reste encore largement confidentiel, il est en train de se répandre comme une trainée de poudre et connait ses belles heures de gloire avec des disques encore cultes aujourd’hui. Kampfar arrive un poil à la traine par rapport à ses petits copains de récré, mais sa démarche est tout autre et œuvre plutôt dans un Black Metal glacial, mélodique, fortement teinté de racines folkloriques, ce que l’on appelle désormais le Pagan Black Metal.

Kampfar en fût l’un de ses premiers représentants et Mellom Skogkledde Aaser en un témoignage précieux et important. A l’inverse de beaucoup de groupes à l’époque, le duo norvégiens prend la tangente et propose un Black Metal qui n’est pas spécialement violent, en tout cas ce n’est pas le but premier, mais déploie plutôt une ambiance frissonnante et des mélodies folkloriques conférant à ce disque une vraie personnalité dans la scène norvégienne de l’époque et une volonté de montrer autre chose. Car Mellom Skogkledde Aaser est un album d’une beauté rare, cristalline et si sa froideur vous enveloppe c’est pour mieux contempler le charme d’une nature brute, hostile, mais terriblement séduisante. A l’inverse de groupes de Black Metal qui voient la nature comme un moyen de réclusion, de solitude, de haine de l’être humain, Kampfar épouse plutôt le fait de ne faire qu’un avec ces forêts enneigées, ces lacs gelées et ces sommets montagneux difficile à gravir, mais dont la vue et le paysage que l’on contemple, vaut tous les sacrifices du monde. C’est simple, écouter Mellom Skogkledde Aaser c’est faire corps avec une nature rude, mystique et lumineuse.

Tout dans cet album est marqué d’une empreinte vivifiante et épique. Les mélodies folkloriques ou les cœurs dans Hymne en sont un bon exemple. Comme chez leurs compatriotes de Windir, Kampfar sait trouver la mélodie qui sublime, qui transporte, qui rend un titre qui fait la différence entre une écriture calculée, conforme et celle qui vient des tripes. Parce que ce Mellom Skogkledde Aaser possède vraiment un côté émotionnel, naïf même, qu’on ne retrouve que peut dans les œuvres de Pagan Black Metal. C’est le cas des deux mélodies au sein de Valdogg qui parsème les assauts plus ténébreux. Il y a ce quelque chose de fin, sincère qui surnage de cette tornade de trémolos agressifs. Le son de guitare fait également beaucoup pour ce disque, il n’est pas trop incisif, juste ce qu’il faut pour porter d’excellent riffs entrainants et guerriers comme sur Valgalderkvad. De même, la batterie axe plutôt son jeu sur du mid-tempo, bien qu’on ait quelques accélérations et rythmique très soutenue comme sur Kledd I Brynje Og Smykket Blodorm, néanmoins maintenu par des éléments folklorique de toute beauté.

C’est sans doute là tout le talent de Kampfar sur ce premier album, c’est de jouer avec subtilité entre les passages agressifs, les moments de pure évasion, mais aussi de jongler avec habilité entre les éléments folkloriques et ceux électrique. Un vrai travail de funambule avec encore une fois Valdogg en parfaite illustration ou bien Hymne à la mélodie incroyable et où les cœurs viking font mouche. C’est puissant et adroit, un peu comme certains titres d’Enslaved qui arrivent à dégager ce sentiment d’exaltation et de ferveur comme touché par la grâce des dieux d’Asgard. Tout semble couler de source, de manière très naturelle comme sur le titre Bukkerferd par exemple, où les breaks entre les parties rapides et les moments d’accalmies (certains mid-tempo font presque penser à une sorte de rituel ou de procession) sont vraiment jouissifs, toujours portée par une ligne de guitare en général assez simple, mais d’un phrasé et d’une beauté qui impose le respect.

Nul besoin d’épiloguer d’avantage, Mellom Skogkledde Aaser, est un petit bijou de Pagan Black Metal. Il est traversé d’ambiances incroyables, d’une spontanéité et d’un naturel qui fait souvent trop défaut dans le genre, surtout actuellement. Avec ce premier album, Kampfar, tout comme Windir dans sa discographie, arrive à cristalliser à ce qui fera l’essence de ce genre, mais sans jamais aller dans les clichés, ni verser dans la musique faussement épique avec une multitude de notes éculées ou les chansons à boire. Un superbe album, tout court, et pourquoi pas un disque à écouter pour montrer que non, la musique Pagan / Folk, ne se résume pas à des beaufs avec des cornes à boire.