Quelque part dans le manuel qu’on a dû donner aux gars d’I not dance quand ils se sont formés doit être indiqué qu’un album doit nécessairement compter 8 morceaux, format strictement respecté depuis So You Think You Can Stop Me And Spit In My Eyes en 2008.
A elle seule, la pochette de We Are Guilty And So Are You est cependant révélatrice de l’évolution en cours. L’apparition de la couleur et le mouvement esquissé vers la lumière d’un soleil, certes rasant mais bien présent, tranchent significativement par rapport à la noirceur des artworks précédents. Et en effet, il ne faut pas longtemps pour comprendre que le groupe poursuit sa mue. Si Thought Leader s’était distingué de son prédécesseur par l’évolution du chant, devenu bien plus rugueux qu’il ne l’était auparavant, ce qui marque avant tout ici c’est le changement de tempo, tant les compositions se sont alourdies, voire même ralenties pour certaines d’entre elles. Cette mutation est telle qu’il faut désormais définitivement oublier l’étiquette « Screamo » qui restait associée à la formation. Sans se perdre dans des débats de classification stériles et sans fin, une chose est certaine : le I not dance des débuts n’est plus. Et c’est bien là que le bât blesse.
Difficile de pointer les responsabilités mais plusieurs éléments font que We Are Guilty And So Are You n’est pas à la hauteur des espérances que l’on pouvait placer en lui. Ce qui fait qu’un album est réussi est avant tout une question d’alchimie, les différents titres devant habillement se combiner pour former un ensemble cohérent. Ici, si pris un par un, les morceaux ne sont fondamentalement pas mauvais, aucun d’entre eux ne se distingue particulièrement et ne tire l’ensemble vers le haut. On reste ainsi orphelins de ces temps forts, qui permettraient de structurer, de dynamiser l’écoute et surtout de susciter de l’attente. On reconnait bien çà et là certains des éléments qui forgent l’identité musicale des Autrichiens mais définitivement, la mayonnaise ne prend pas. Pire, si les premiers titres se montrent plutôt intéressants et passent bien, une fois passé sur la face B (à partir de Reflections), l’ennui guette, les structures se répètent et le combo ne semble pas être en mesure d’apporter du sang neuf pour relancer la machine. Ce ressenti se retrouve d’autant plus renforcé que le groupe se perd dans des compositions souvent bien trop longues. Cinq d’entre elles tournent ainsi inutilement autour des six minutes. Un raccourcissement d’une ou deux minutes aurait clairement joué en leur faveur tant celles-ci atteignent bien trop rapidement un pallier qui, tel un plafond de verre, n’est jamais dépassé. On ne retrouve ainsi jamais le grain de folie ou la puissance mélodique des riffs qui avaient fait la réussite des précédentes réalisations.
We Are Guilty And So Are You n’est pas pour autant mauvais et contient quelques réussites comme l’ouverture Where The Land Meets The Sea qui propose une montée en puissance progressive convaincante mais la formation rate ici continuellement sa cible. Et pourtant, à chaque fois, on a l’impression qu’il s’en serait fallu de peu pour transformer l’essai, ce qui rajoute à la frustration. Le chant, bien trop monotone, joue pour beaucoup dans ce manque d’inspiration, sans compter que certains passages en voix claire (comme l’intro de Gladiator) sont assez maladroits voire même tendent à gâcher ce qui aurait pu constituer un bon titre (Cut You Down). Je ne sais pas de quoi nous sommes collectivement coupable, mais en ce qui concerne I not dance le verdict s’impose de lui-même : manque flagrant d’inspiration.
We Are Guilty And So Are You est disponible gratuitement sur bandcamp.
A écouter : les 2 ou 3 premiers titres sont suffisants pour se faire une bonne idée de l’album. A vous de voir ensuite s’il est utile de poursuivre…