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Biographie

Earl Sweatshirt

Earl Sweatshirt, de son vrai nom Thebe Neruda Kgositsile, a grandi dans les environs de Los Angeles et se fait un nom grâce à Tyler, the Creator, lorsque celui-ci le découvre sur MySpace sous le pseudo Sly Tendencies. Earl rejoint alors le collectif Odd Future et sort en 2010 son premier opus, sobrement intitulé Earl. Malgré de nombreux retours positifs, le musicien disparait de la circulation, envoyé dans un centre thérapeutique pour enfants à problèmes sur l’ile de Samoa par sa mère. Il se focalise sur la biographie de Macolm X et revient sur le devant de la scène en 2012, dévoilant le titre « Home » sur internet.
Il participe par la suite à quelques titres avec Frank OceanTyler, the Creator ou Domo Genesis, se concentrant ensuite sur son second opus Doris, qui arrive en 2013 chez Columbia Records. On y retrouve beaucoup de guests, dont Mac Miller.

En 2015, il frappe fort avec I Don't Like Shit, I Don't Go Outside, puis revient à la fin de l'année 2018 avec Some Rap Songs.

16 / 20
2 commentaires (15/20).

Some Rap Songs ( 2018 )

Au premier abord Earl Sweatshirt, 24 ans cette année, a tout de l’éternel ado paresseux, limite asocial. Son précédent album, I Don’t Like Shit, I Don’t Go Outside, marquait cependant son entrée véritable dans le monde des adultes. S’autoproduisant sur la plupart des morceaux, il examinait sans prendre de gants ses angoisses et son rapport au monde qui l’entourait. Obsédé par la "simplification" selon ses propres mots, il continue de se réduire pour toucher d’encore plus près à une vérité que la plupart de ses collègues rappeurs décident d’éluder par tous les moyens possibles. Some Rap Songs : difficile pourtant de faire un titre plus je-m’en-foutiste, en particulier pour un disque ne durant que 24 minutes et illustré par une photo ratée de son auteur. Rien n’est pourtant bâclé sur cet album, qui démontre avec brio qu’aller à l’essentiel peut être, évidemment, le chemin le plus court, mais également le plus enrichissant.

Spontanéité et sincérité sont donc au programme pour le rejeton d’Odd Future, avec 15 chapitres brefs mais prenants, qui s’enchaînent comme les moments d’une journée se déroulant entre ennui, déprime et lueurs d’optimisme. Earl Sweatshirt et son flow hypnotisant s’appuient sur des instrus piochant à la fois dans ce qui se fait de plus tendance actuellement (Nowhere2Go, The Mint) et dans le Blues ou la Soul (Ontheway!, The Bends). Entre introspection douloureuse ("I think I spent most of my life depressed, only thing on my mind was death") et acceptation d’un futur plus engageant ("Now I’m solely honor, livin’ is a must"), Earl Sweatshirt semble plus à l’aise que jamais. Une confiance qui l’a certainement conforté dans sa volonté d’offrir un concentré de ce qu’il sait faire, de rendre l’ensemble encore plus percutant.

Evidemment, les moments de doute n’ont pas disparu, comme sur les sombres et inquiétants Loosie et Peanut, qui laissent planer la menace d’un danger imminent. Mais le Californien continue à avancer. N’ayant jamais occulté ses problèmes familiaux, il convoque cette fois-ci ses parents sur Playing Possum. Quelques mois après la mort de son géniteur, le poète et activiste sud-africain Keorapetse Kgositsile, le morceau prend une dimension quasi surnaturelle, entremêlant leurs deux voix dans un dialogue particulièrement touchant. "Gotta keep it brief", répète-t-il sur Red Water. Une profession de foi autant qu’une injonction à tous ceux qui voudraient trop analyser son oeuvre ? Dans le doute, il est plus sûr de suivre son conseil et de mettre fin à cette chronique avant qu’elle ne dilue l’énergie viscérale d’un album précieux, attachant et sincère.

16.5 / 20
1 commentaire (15.5/20).
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I Don't Like Shit, I Don't Go Outside ( 2015 )

En 2013, un Doris de haut niveau faisait la part belle à de nombreux et prestigieux invités (de RZA à The Neptunes en passant par The Alchemist ou Badbadnotgood), ainsi qu’à ses compères du collectif Odd Future (Tyler, The CreatorFrank OceanDomo Genesis). Earl Sweatshirt y tirait son épingle du jeu sur des morceaux laissant entrevoir un attrait particulier pour le côté obscur du rap game, les angoisses liées à la célébrité, la perte de ses proches, l’alcool et la drogue.

Deux ans plus tard, dans une démarche radicale, il décide de laisser de côté le superflu et de tailler au plus près de l’os. 30 minutes et un titre évocateur et misanthrope (« Je n’aime rien, je ne sors pas de chez moi ») suffisent à faire passer le message de façon claire et nette. La désagrégation annoncée d’Odd Future (ou pas, difficile de savoir ce qu’il en est vraiment) semble avoir libéré, et dans le même temps concentré, son énergie créatrice. Ambiances toujours plus sombres, instrus minimalistes, beats étouffés…ce nouvel album nous donne l’impression de passer une demi-heure enfermé dans le noir d’une pièce enfumée dont on sortirait, si ce n’est plus heureux, du moins plus lucide et prêt à affronter ses démons intérieurs. Claustrophobes s’abstenir…

Car c’est bien de cela qu’il s’agit pour Earl Sweatshirt, qui reste ici cloîtré, dans un exercice schizophrénique, pour échapper à ses problèmes tout en les gardant constamment à portée de main, telle la matière douloureuse mais dense de morceaux hypnotisants et fiévreux, marqués par une décontraction désabusée flirtant avec la déprime et le fatalisme (« My days are numbered, I’m focused heavy on making the most of’em » Faucet). Sur Grief, la lucidité dont il fait preuve prend la forme d’une véritable confession (« Lately I’ve been panicking a lot, feeling like i’m stranded in a mob, scrambling for Xanax out of the canister to pop »). Son flow se ralentit encore, laissant transpirer une sincérité touchante (« I just want my time and my mind intact, when they both gone, you can’t buy’em back »), il baisse la garde et appuie où ça fait mal, une approche particulièrement directe qui lui évite l’écueil de la longueur et de l’ennui.

Producteur sur la quasi-totalité des morceaux, il limite cette fois-ci les featurings, ne conviant que Da$hWikiNa’kel (sur un DNA d’une grosse intensité) et son pote Vince Staples (auteur, au passage, d’un grand disque cette année avec Summertime) pour un Wool final ne laissant aucun doute sur le fait que ces deux gamins, 21 ans pour Earl et 22 pour Vince, risquent d’être au sommet pendant longtemps. Earl Sweatshirt livre 30 minutes sous tension dont on ressort éprouvé et sonné, les sens engourdis mais les nerfs à vif. Une expérience à vivre pleinement.

A écouter : En retenant son souffle
16 / 20
2 commentaires (13/20).
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Doris ( 2013 )

Sans doute l’un des membres de Odd Future les plus discrets mais aussi les plus actifs, Earl Sweatshirt nous lâche Doris, son second opus. Entre-temps, le musicien a fait un séjour en dehors des USA et a collaboré avec quelques autres artistes du collectif sur leurs albums respectifs, avec un impact potentiel sur sa musique. Qu’en est-il du Earl Sweatshirt de 2013, après tous ces mouvements ?
Bien loin de l’image que l’on peut se faire d’Odd Future et de ce côté barré de Tyler, Earl Sweatshirt livre avec Doris un album plus adulte : le timbre du MC est devenu plus grave, le vocabulaire est plus riche, la réal des clip est plus travaillée (« Whoa », l’excellent « Chum » en noir et blanc). Pour autant, cet opus est moins virulent que ceux de Tyler, moins abrasif même si il ne respire pas la joie de vivre (« Sunday », « Burgundy ») du flow aux instrus. C’est d’ailleurs ce qui caractérise Earl (et le collectif) : cette sensation désabusée d’une génération hardcore, qui (sur)vit avec comme arme des mots. Les textes sont égocentriques, narcissiques, mais on ne peut le reprocher tant le quotidien des musiciens y transparait : haine, drogue, tentative d’aller de l’avant sans trop y croire. Les paroles ne cherchent pas à aller de l’avant ou à se faire miroiter un futur, mais sont ancrées dans le passé et le présent : « Centurion » ou « Guild ». Ici, l’ensemble rend Doris poignant et bien plus intéressant que Earl.

« Haters be pleading me to stop but I don't even bother Though my approach is seeming awkward, I could see it proper See success and I just see the fact that I don't need a father » (« Knight »)

Niveau featuring, le liste peut faire rêver : Mac MillerRZA (qui apporte sa touche vocale et stylistique sur « Molasses »), Vincent StaplesDomo GenesisFrank OceanCasey Veggies ou encore Tyler, the Creator se retrouvent sur Doris. A un tel point que les titres ou le MC se retrouve seul sont rares - « Chum », « Uncle Al » et « Hoarse » - et au final très agréables même si son flow est très sobre. Chacun des guests apporte sa touche, que ce soit sur les instrus (Tyler qui ne plombe pas autant l’ambiance que sur ses opus mais apporte son côté épuré) ou le rythme du morceau (Domo Genesis et sa touche urbaine sur « 20 Wave Caps »).

Enfin, on ne peut pas parler de Doris sans aborder les multiples références culturelles, et ce quel que soit le registre : Gil Scott-Héron, Marmaduke, Marilyn Manson, Anakin Skywalker, Jay-Z, Tony Womack, Paul Revere, … Et cela uniquement dans « Centurion ». C’est grâce à cela que l’on peut voir une certaine partie de l’évolution d’Earl Sweatshirt : sur Earl, il était question de références beaucoup plus générales (Miley CyrusRedman, Dawson Creek, …) alors qu’on creuse ici sur certains aspects historiques de la culture américaine.

Doris est l’album rêvé, bien plus percutant que Goblin de Tyler, the Creator. Pas aussi Hardcore toutefois que peut l’être son homologue, Earl Sweatshirt pose ses ambiances et livre un très bon album, so(m)bre qui varié. Et puis il faut avouer que la liste des guests a de quoi vendre du rêve.

A écouter : Chum - Whoa - 20 Wave Caps
Earl Sweatshirt

Style : Hip-Hop
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Origine : USA
Site Officiel : earlsweatshirt.com
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