Le vol est puni par la loi. Tout comme le plagiat ou le piratage d'ailleurs. Sans talent, Druid aurait pu passer pour une belle bande d'escrocs ou au mieux un tribute band de seconde zone comme il en existe des centaines. Mais une petite graine de génie aura parvenu à attirer l'attention. Derrière son artwork à la fois haut en couleur et cérémonial, cet éponyme recèle quelques trouvailles ingénieuses qui ne contredisent en rien ce sentiment de revival 70's généralisé.
Sur le papier, le collectif venu de l'Ohio nous a préparé une belle tambouille typée Southern Rock et ses dérivés, à laquelle viennent se greffer de multiples influences non-dissimulées. Quoique, revendiquées, serait un terme plus juste. Dès les premières secondes, on pourra sentir l'aura d'un certain «Voodoo Child» du sieur Hendrix dans les échos de cordes étouffées de « Roots&Beings ». Black Sabbath se voit pillé de son solo (retravaillé) de « War Pigs » un peu plus tard avant de laisser apparaître un clin d'oeil aux claviers Pink Floydiens de « Shine On You Crazy Diamond ». Avec Druid, c'est du name dropping par caisses entières, un beau patchwork de riffs célèbres, piqués çà et là dans les recoins du Rock Psyché, du Heavy ou du Hard Rock.
Pourquoi en parler alors ? Parce que tout cela est fait avec brio, une bonne maîtrise des genres et mine de rien un sacré culot. Et si la galette tape dans un spectre stylistique assez large, Druid parvient à harmoniser le tout, faisant accepter à son auditoire qu'un titre peut partir en vrille à tout moment.
C'est d'ailleurs un sacré coup de fouet que ce riff Stoner du désert-Grosse Moto stéroïdé qui s'abat sur « Whale » après une nage paisible au milieu de notes épurées et apaisantes. Et sur « Whale » comme ailleurs, le chant (partagé entre deux voix), grand atout de la formation, se pare de tous les costumes sans la moindre gêne, s'appropriant sans singer des tessitures d'Axl Rose ou Gilmour. Avec le groove comme première ligne de conduite, les Américains fuzzent sur un Hard Rock catchy (« No Good Man »), ou s'adonnent à une virée Stoner/Doom pendant « Mount Sinjar/Evil Sands » avec tout autant de succès. Question guitares, ça balance du solo à tout moment sans en devenir pénible ou auto-masturbatoire, ingrédient supplémentaire pour parfaire un ensemble déjà conséquent en termes de versatilité.
Tout au long de l'album, Druid nous tient en alerte. Nous sont proposés des morceaux qui puisent allègrement de tous les côtés, évitant de dupliquer à l'infini des riffs et rythmiques entendues trop souvent sur un même disque. On pourra noter quelques passages à vide, là où la voix ou le rythme se font moins convaincants et immédiats (« Mushroom Fields/Luke's Wall »), qui resteront minoritaires et anecdotiques une fois les sept tracks passées.
Avec une pareille cover, on aurait pu imaginer sans scrupules un énième groupe perché, passioné par la weed et Satan (non pas que ce soit mal, mais plutôt standard à l'heure actuelle). Druid fait du déjà-vu sa force première, appuyé par des musiciens expérimentés dans les répertoires visités. Libre à vous de vous prendre au jeu du trio d'Athens et sa recette fédératrice. Votre serviteur attend en tout cas de pied ferme leur prochain long format, qu'il espère déjà aussi surprenant que son aîné.
A écouter : No Good Man, Whale, Roots & Beings