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Biographie

Anathema

Anathema est né en 1990 à Liverpool de l'inspiration des frères Vincent, Daniel (tous deux guitaristes) et Jamie Cavanagh (bassiste) remplacé en 1992 par Duncan Patterson, sous le nom de Pagan Angel. Au début de sa carrière, le groupe donne dans un style doom death puissant et lourd, de leur premier eo Crestfallen en 1992, en passant par leur premier album Serenades en 1993, jusqu'à l'ep Pentecost en 1995. Le pessimisme noir et l'âpre désespoir qui émanent alors de la musique du groupe ne disparaîtront jamais par la suite. Après le départ du chanteur Darren White, Anathema se tourne vers un son de plus en plus rock, mais surtout bien plus créatif, ce qu'annonce déjà The Silent Enigma paru la même année, varié, enivrant et mélodique, avec des passages heavy. Vincent Cavanagh passe chanteur du groupe avec de plus en plus de réussite. On retrouve ainsi une jolie reprise des Pink Floyd, Hope, sur Eternity en 1996, album qui rappelle le son des dernières oeuvres du groupe mythique, fait de guitares en apesanteur et de claviers éthérés. Puis en 1998, Alternative 4, rempli de pépites émotionnelles en grande partie ciselées par Duncan Patterson, leur offre un beau succès critique. C'est le dernier disque sur lequel apparaît le bassiste, qui quitte le groupe en raison de divergences sur la direction musicale pour fonder Antimatter.  Il est remplacé en 1999 par Dave Pybus pour Judgement, album plus accessible que le précédent. En 2001, Les Smith, claviériste de Cradle Of Filth déjà présent sur Eternity, rejoint le groupe pour l'enregistrement du lancinant et mélancolique A Fine Day To Exit.  Leur musique devient de plus en plus atmosphérique et l'album A Natural Disaster en 2003 atteint une qualité remarquable, les compositions de Danny Cavanagh n'étant parfois pas sans rappeler le meilleur de Radiohead, autre influence pregnante du groupe au fil des ans, entre complaintes torturées et bijoux harmonieux. C'est Jamie Cavanagh qui tient la basse sur ce disque, et on peut y entendre la très jolie voix de Lee Douglas, la soeur du batteur John Douglas. Anathema, demeure un groupe souvent méconnu, mais sincère et touchant, toujours prêt à innover, dont la musique émotionnellement riche mériterait surement un public plus large. En 2006 le groupe cherche un label pour son prochain opus dont quelques morceaux sont alors mis à disposition gratuitement sur son site officiel. A défaut du nouvel album tant attendu, c'est finalement un disque de réinterprétations acoustiques qui sort finalement en 2008: Hindsight. Il faudra encore attendre deux ans avant de voir Anathema pleinement de retour aux affaires avec We're Here Because We're Here, la, déjà, douxième sortie des britanniques.

16.5 / 20
4 commentaires (12.13/20).
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Distant Satellites ( 2014 )

Après la trilogie bleue ou trilogie de la lumière, on craignait qu'Anathema ait affadi sa musique au risque de la rendre lisse et sans âme. Distant Satellites était donc attendu au tournant. 

Les premières impressions sont plutôt bonnes.  Le dyptique The Lost Song chante ainsi l'amour sur de belles mélodies. Vincent Cavanagh pose sa voix sur une orchestration syncopée batterie et piano où les cordes ont la part belle tandis que la chanteuse Lee Douglas hérite d'une chanson piano voix tout en douceur qui prend de l'ampleur au fur et à mesure grâce aux cordes. The Lost Song 1 et 2 semblent ainsi se répondre comme leurs interprètes. Dusk confirme cette tendance avec cette fois l'apport des guitares et les chœurs de Lee Douglas pour accompagner Vincent Cavanagh. Quant à Ariel, c'est une jolie complainte de la chanteuse piano-voix toute en délicatesse avant une montée porogressive où Vincent Cavanagh se fait entendre. 

Le résultat est jusque là emballant et pose un premier constat, donner du temps à Lee Douglas pour s'exprimer est une bonne idée. Le travail sur le chant de Vincent Cavanagh et Lee Douglas est une totale réussite et donne beaucoup d'émotions et de fougue à des pistes où les instruments semblent toujours s'imbriquer harmonieusement. Ainsi musicalement le groupe retrouve des couleurs et l'interprétation est vraiment habitée et fièvreuse. The Lost Song 3 marie les voix de nos deux chanteurs en une touchante histoire d'amour, celle là même qui parcourt tout le disque et semble s'éteindre avec Anathema ("And we failed But I loved you"). Là, le final bardé de guitares donne du poids à la chanson. 

Les dernières pistes innovent. Il y a d'abord l'hypnotique You Are Not Alone où tout à coup on décèle une pointe de Radiohead dans ce son de guitare acide et syncopé sorti tout droit de Hail to the THief. Contraste avec Firelight qui suit. Un instrumental en forme de petit score de film, mélancolique et cristallin. Distant Satellites rappelle cette fois le Radiohead de KId A avec au début du morceau une rythmique saccadée sur laquelle une nouvelle chanson d'amour déçu vient se poser. Nos amoureux du début du disque ne sont plus que des satellites distants magnifiés par ce morceau qui finit en apesanteur. On pense à Sigur Ros, ce que confirme Take Shelter. Le piano et les cordes nous entraînent vers un final sous forme de rock atmosphérique.

Distant Satellites est une excellente surprise et tout simplement le meilleur disque de Anathema depuis A Natural Disaster. On ne peut que saluer la beauté de l'ensemble aussi bien du chant à deux voix que des compositions. L'un des très bons disques de 2014 à n'en pas douter.  

A écouter : en entier c'est aussi bien
14 / 20
8 commentaires (13.81/20).
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Weather Systems ( 2012 )

Après le chef d'oeuvre A Natural Disaster et quelques années de purgatoire (le groupe s'est retrouvé sans label), Anathema s'est décidé à évoluer vers un son plus clair, en particulier avec We're Here Because We're Here (2010) et Falling Deeper (2011). Au printemps 2012, Weather Systems semblait ainsi venir compléter une sorte de trilogie de la lumière. 

Le dyptique de l'amour, Untouchable Part 1 et 2, entre lumière et ombre, douceur et mélancolie, annonce la couleur. La musique d'Anathema est peut-être plus lisse qu'avant, mais elle est toujours aussi aérienne et sentimentale. L'émotion qu'elle entraîne n'est pas forcément la même que celle née de A Natural Disaster ou A Fine Day To Exit, mais elle est profonde pour celui qui s'y laisse aller. 

Ainsi, le disque déploie une thématique lumineuse avec notamment The Gathering of the Clouds, Lightning Song et Sunlight. Les voix de Daniel Cavanagh et Lee Douglas se répondent et le potentiel lyrique de Weather Systems s'affirme par ses guitares mélodieuses et de jolis arrangements de cordes. La forme rejoignant le fond, cet album respire par instants la sérénité à travers des paroles positives et apaisées comme par exemple "Sunlight failed but only for a while / In the moonlight pale someone made me smile". 

La suite surprend aussi agréablement. The Storm Before the Calm montre une nouvelle facette du groupe, avec en premier lieu un chant entêtant et des sonorités plus agressives, puis une seconde partie plutôt épique, l'oeuvre du batteur John Douglas. De facture plus classique venant des anglais, The Beginning and The End ne dépareille pas, avec une lente montée empreinte de lyrisme. Une forme de mystique finit par se dégager de l'album et à ce stade, il n 'y a plus de doute, la mue d'Anathema a réussi. The Lost Child confirme l'impression laissée par l'ensemble. En renouant avec la mélancolie, le morceau semble même tout droit sorti de A Natural Disaster.

Et puis vient la conclusion, inattendue et tranquille. Internal Landscapes est d'abord le récit d'une EMI, une expérience de mort imminente. Une voix masculine tente d'expliquer son ressenti et ses pensées sur son lit de mort. Un adieu à sa femme, le lâcher prise et puis le sentiment d'être paix, amour et lumière. La musique enfle ensuite progressivement, comme une onde lumineuse, et puis s'apaise avec cette même voix masculine : "I was peace, I was love, I was the brightness, it was part of me".

Weather Systems ne plaira pas à tout le monde. Les fans d'Anathema risquent d'être partagés face à la positivité de cet album. Mais, pour celui qui s'y laisse prendre, ce disque demeurera un voyage spirituel de belle facture, sur le fond comme sur la forme. 
 

A écouter : comme un voyage spirituel
17.5 / 20
20 commentaires (17.53/20).
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A Natural Disaster ( 2003 )

Après A Fine Day To Exit, Anathema a traversé une période trouble avec un Vincent Cavanagh sur le départ. Jamais avare de dissensions, le groupe s'est finalement ressoudé, retrouvant le frangin Jamie Cavanagh à la basse pour la première fois depuis plus de 10 ans. Pour la bonne cause. Avec ce disque, la tristesse n'aura que rarement été aussi agile et planante.

Harmonium ouvre en faisant la part belle au chant clair, aux nappes de claviers, mais aussi aux guitares accrocheuses, ingrédients qui font tout le sel du disque. Balance chasse un climax musical qui ne viendra pas, se couplant plutôt en une forme de seul et même morceau à Closer, piste en contraste où des effets électroniques sur la voix rendent les paroles minimalistes de la chanson indistinctes,  créant un son étrangement atmosphérique. Avec cette entrée en matière, on ressent une bonne dose de Radiohead dans le chant et certaines mélodies, qui évoquent tantôt Ok Computer, tantôt Kid A. Mais le groupe sait se réinventer joliment en jouant sur les contrastes de ses chansons. Childhood Dream est courte, mais on y entend une petite musique post-rock aussi légère  que ces babillements d'enfants. Un moment de rêve donc, de grâce et d'égarement avant la retombée dans le gouffre, et ce Pulled Under At 2000 Meters A Second qui se fait coléreux, avec ses guitares incisives et son refrain amer : "Freedom is only a hallucination That waits at the edge of the places you go when you dream .... ". Le disque prend un air de réunion familiale quand Lee Douglas, soeur du batteur, pose sa voix délicate sur le morceau titre A Natural Disaster, presque sorti de nulle part, tant le son y est plus classique, pour le meilleur heureusement.

Les dernières pistes sont probablement les plus abouties de l'album. Flying dont les paroles font écho à Harmonium,  "and though i said my hands were tied times have changed and now i find i'm free for the first time", est un de ces morceaux qui suintent l'abattement malgré les lueurs du jour. Revenir toujours sur terre "back down to earth",  tel semble le triste constat que Anathema nourrit sur cet album. Ni le rêve, ni l'amour (Electricity), ni l'imagination ne transportent assez longtemps pour se défaire de la sourde douleur de l'amertume. Cet album se joue des clichés du doom que le groupe affectionnait, offrant une musique lumineuse et délicate pour mieux enfoncer le dard empoisonné de la mélancolie loin au plus profond des veines. Et c'est dans cette conscience du beau et de sa décrépitude que se joue Violence qui conclue l'album, reprenant en 10 minutes instrumentales tout ce qui fait l'âme de ce disque. Le piano remplit l'espace avant l'envol des guitares et de la batterie qui lance une cavalcade à vous donner le frisson. Et puis pendant de longues minutes, on retrouve ce piano qui berce et caresse jusqu'à la sortie finale, minimaliste.

Harmonies vocales, guitares en apesanteur, claviers ambianceurs, touches électroniques, tout concourt  à nourrir un climat particulier sur ce disque où "le bonheur c'est d'être triste". Sans jamais revenir aux son métallique d'antan, les morceaux renferment une puissance émotionnelle qui transporte l'auditeur, dans leurs crescendos comme leurs plages éthérées qui achèvent les morceaux en douceur. Le terme de rock atmosphérique est amplement justifié ici. Un très joli disque.

A écouter : Closer, Flying, Violence